François Barnoud est ingénieur de formation. Il réfléchit depuis vingt ans au moyen d’améliorer le fonctionnement des institutions et de la vie publique. Convaincu que le carriérisme des politiciens constitue le maillon faible des systèmes représentatifs, il préconise une véritable déprofessionnalisation de la vie politique et livre pour la première fois ses réflexions au public.
Dans cet ouvrage paru aux éditions du Cliquet, François Barnoud propose de réformer en profondeur nos institutions afin d’en finir avec « la dérive d’un système politique dans lequel les représentants élus, devenus de véritables professionnels, consacrent toute leur énergie à être réélus plutôt qu’au bien public ».
Nous avons déjà eu l’occasion de parler de la démocratie, avec un séminaire et la traduction du livre de Frank Karsten et Karel Beckman : Dépasser la démocratie. Il y a un véritable débat sur la façon d’aborder le sujet. Soit on définit la démocratie de façon à considérer le marché comme sa plus haute expression, et la social-démocratie comme une forme pervertie de démocratie. Soit on oppose catégoriquement démocratie et marché (voir également Martin Masse, La démocratie contre la liberté). Ici l’auteur prend le pari qu’on peut sauver la démocratie d’elle-même, de ses dérives naturelles. Car il y a un constant sur lequel on peut s’accorder empiriquement : non seulement la démocratie a échoué à contenir la croissance de l’État mais l’a en plus largement favorisée. La question est alors de savoir si certains mécanismes institutionnels et juridiques, permettraient à la démocratie de contenir cette croissance, voire de l’inverser.
Pour cela, l’auteur propose trois conditions de possibilité :
- l’existence d’une juridiction souveraine qui protège l’intérêt commun de l’intérêt privé et l’intérêt privé de l’intérêt commun ;
- la plus grande multiplicité possible de centres autonomes de décision ;
- et la résistance à l’unification impériale (venue de l’intérieur et de l’extérieur).
Extraits :
« Dans la mesure où la délégation de pouvoir résulte d’une contrainte technique, le problème principal ne tient pas à l’existence – inévitable – des représentants, mais à l’inadéquation du cadre juridique actuel, qui transforme la plupart des représentants en politiciens professionnels. Lorsque la politique devient un métier à part entière, il est évident que les chercheurs de mandats sont contraints d’ajuster leurs pratiques et leurs discours à la réalité du jeu électoral dont dépend leur avenir. C’est pourquoi, au lieu de s’indigner sans cesse au sujet de l’absence de vertu supposée des politiciens, il nous est apparu opportun d’esquisser un nouveau statut juridique capable de neutraliser le carriérisme politique, c’est-à-dire de ré-impliquer la majorité des citoyens dans la gestion des affaires publiques. »
« Comme il arrive souvent aux gouvernants et aux gouvernés de confondre les mots et les choses, il n’est pas inutile de rappeler que la démocratie est d’abord un mot de dix lettres de la langue française, c’est-à-dire une invention langagière (en l’occurrence: une traduction) qui n’est jamais assurée de trouver son sosie concret dans le grand réel. Le mot désigne bien quelque chose, c’est certain, mais il n’est pas certain que la chose en question existe actuellement, ni que la chose ait existé dans le passé, ni même qu’elle puisse exister dans le futur. En toute rigueur, il n’est pas exclu que le mot démocratie appartienne à cette famille de mots qui ne désignent rien d’existant et qui – à ce titre – relèvent exclusivement du domaine de la foi. » p.227
Table des matières
La démocratie comme modèle théorique – La démocratie comme concept – La démocratie comme principe – Le naturel démocrate – La démocratie comme régime – Condition 1. La séparation du public et du privé – Condition 2. La dissémination des centres du pouvoir – Condition 3. La résistance à l’unification impériale – Brève histoire de la démocratie proclamée – L’invention grecque – Genèse de la « démocratie » moderne – Révolutions anglaises Révolution américaine Révolutions françaises Révolutions russe -s De la « démocratie » contemporaine – La révolution du Cliquet Matrice de principes archidémocratiques.….. Exercice de simulation…
Je partage l’opinion de l’auteur sur le problème que constitue le carriérisme des hommes politiques : mon expérience vue de l’intérieur racontée en BD dans cette séquence du blog :
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