Traduction : Geoffroy Le Gentilhomme, Institut Coppet
Les commentateurs ont soulevé quelques points communs intéressants entre la crise actuelle et la Grande Dépression des années 1930. Même si nous survivons aux folies dépensières de Washington, le Congrès et l’administration Obama pourraient nous conduire à la catastrophe s’ils augmentaient fortement les impôts ou les droits de douane, comme le Congrès le fit en 1930 et 1932. Mais d’autres parallèles devraient attirer notre attention.
Des sommes monumentales pour le sauvetage des banques. Des augmentations vertigineuses de la dette publique. Une concentration du pouvoir entre les mains du gouvernement central. D’incessantes revendications financières de la part des groupes d’intérêt. La rhétorique démagogique de la lutte des classes. Si ces éléments sont familiers à l’Américain du XXIe siècle, ils l’étaient tout autant au Romain de l’Antiquité, citoyen d’un état condamné à un destin funeste.
Durant les dernières années de la République Romaine, un voyou du nom de Clodius fut candidat au poste de tribun de la Plèbe. Il soudoya l’électorat en promettant de distribuer gratuitement des céréales (en vérité aux frais du contribuable), et gagna. Par la suite, les Romains adoptèrent l’idée qu’il était plus avantageux d’obtenir un revenu par des moyens politiques plutôt que par le travail. Cela a conduit l’économiste Howard E. Kershner à énoncer la loi qui porte son nom : « Quand un peuple autonome confère à son gouvernement le pouvoir de prendre aux uns pour donner aux autres, le processus de redistribution ne cesse qu’à partir du moment où le dernier contribuable est dépouillé de tous ses biens ».
À Rome, les candidats au pouvoir dépensaient d’importantes sommes d’argent pour gagner les faveurs du public. Ils pillaient ensuite la population pour satisfaire les groupes d’intérêt qui les avaient fait élire. Après que la République eut été remplacée par la dictature, les Empereurs se succédèrent, et tous bâtirent leur puissance en accordant des subventions et en versant des allocations publiques. A l’époque de la naissance du Christ, presque un tiers de la ville de Rome recevait des aides publiques.
En réaction à une violente crise monétaire et financière en 33 après J.C., le gouvernement décida d’étendre largement l’accord de prêts à taux nul. Dans le sillage de cette crise, les dépenses gouvernementales montèrent en flèche.
En 91, le gouvernement décida d’intervenir dans le secteur agricole. L’Empereur Domitien ordonna la destruction de la moitié des vignobles provinciaux dans le but de restreindre la production de vin et d’en augmenter les prix.
Emboîtant le pas à Rome, de nombreuses villes de l’Empire s’endettèrent. A partir du règne d’Hadrien au début du IIe siècle, les villes en difficulté financière reçurent des aides de Rome et perdirent ainsi une portion considérable de leur indépendance politique.
Le gouvernement central prit également la responsabilité de fournir des loisirs à la population. Des jeux et des combats de gladiateurs étaient organisés pour distraire les masses. Les historiens contemporains estiment que l’équivalent de cent millions de dollars par an furent dépensés pour la tenue de ces jeux.
Sous le règne de l’empereur Antonin le Pieux (de 138 à 161), la bureaucratie romaine atteignit des proportions gigantesques. Selon l’historien Albert Trever, « l’implacable système fiscal, chargé d’organiser la spoliation et le travail forcé, finit par être administré par une armée de soldats bureaucrates. Partout, les bureaucrates à la solde des empereurs » s’employaient à écraser les fraudeurs fiscaux.
Et les raisons de frauder le fisc étaient légions. Selon l’historien romain Suétone, dans la Vie des douze Césars, l’Empereur Néron aurait déclaré en se frottant les mains : « Imposons, imposons encore ! Dépouillons les tous !» Les impôts finirent par détruire d’abord les familles fortunées, puis ils détruisirent les classes moyennes et laborieuses. « Ce que les soldats et les barbares épargnaient, les empereurs le prenaient par l’impôt », selon l’historien W. G. Hardy.
À la fin du IIIe siècle, l’Empereur Aurélien érigea l’accès aux aides publiques en droit héréditaire. Aux bénéficiaires, il offrit, en complément du pain (plutôt que de leur donner du blé et les laisser faire leur propre pain), du porc, du sel et de l’huile d’olive.
Rome souffrit du mal qui afflige tous les États providence : l’inflation. Les pressions exercées sur le gouvernement, pour qu’il dépense et subventionne, se traduisirent en création monétaire. Les uns après les autres, les Empereurs diminuèrent la qualité des pièces romaines pour financer leurs dépenses. Autrefois composé d’argent pur, le denier, en l’an 300, n’était guère plus qu’un jeton dont la teneur en argent n’était que de cinq pourcents.
Les prix montèrent en flèche et l’épargne disparut. Les marchands étaient montrés du doigt alors que les gouvernements continuaient leurs folles dépenses. A cela s’ajouta le contrôle des prix, dont les effets néfastes ravageaient une économie privée affaiblie et déclinante. En 476, quand les Barbares rayèrent l’Empire de la carte, Rome avait commis un suicide moral et économique.
Nous devrions en effet nous inquiéter du retour d’une éventuelle Grande Dépression. Celle qui suivit la chute de l’État providence romain est connue sous le nom d’«Age sombre » et dura plusieurs centaines d’années.
*Source : Foundation For Economic Education
Rien de nouveau sous le soleil! pour compléter je suggère la lecture de Melchior Palyi “Inflation”.
Cordialement.
Alors au travail : abolissant l’argent !