On sait que l’aventure des Jeux Olympiques fut relancée à la fin du XIXe siècle et que la ville d’Athènes, symboliquement, accueillit les premiers Jeux de l’ère moderne en 1896. L’évènement, naturellement, ne fut pas aussi remarqué qu’il l’est aujourd’hui. Cependant, il n’échappa pas à la vigilance de Gustave de Molinari, qui écrivait les chroniques d’actualité dans le Journal des économistes. En 1894, il fait mention du projet de rétablir des Jeux Olympiques, dans les termes suivant :
« Le Congrès international athlétique de Paris se propose de rétablir les jeux olympiques. C’est peut-être un peu vieux jeu, mais cela vaut mieux, après tout, que la roulette et le baccara, sans parler de ce jeu sanglant de la force et du hasard que l’on nomme la guerre. » (Gustave de Molinari, Journal des économistes, juin 1894)
(À noter que le baccara est un jeu de carte qui connut une faveur momentanée au début des années 1890 après le « royal baccarat scandal » impliquant le Prince de Galles, futur roi Edouard VII.)
L’évènement encore à peine en projet, Molinari en perçoit donc l’influence pacificatrice et moralisatrice : le sport peut prendre la place de la guerre dans les activités qui valorisent les activités du corps ; il peut prendre la place des jeux d’argent dans les habitudes populaires.
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Il nous faut faire un bon de trente ans pour retrouver chez Yves Guyot — le successeur de Molinari à la tête du Journal des économistes et à l’écriture de ses rubriques d’actualité — une mention des Jeux Olympiques.
Nous sommes en 1923. Après avoir accueilli les Jeux Olympiques de 1900 (qui devaient initialement être les premiers), la ville de Paris s’apprête à les recevoir de nouveau en 1924. Or la situation économique de la France est des plus préoccupantes. Lourdement endettée suite à la Première guerre mondiale, le pays doit en outre faire face aux dépenses de reconstruction, d’autant plus lourdes à porter que les réparations financières dues par l’Allemagne peinent à être versées.
« Pour une nation qui a besoin de faire des économies, qui a plus de dettes à payer que de créances à recouvrer, les prodigalités comme les subventions aux Jeux Olympiques sont des aberrations. » (Yves Guyot, Journal des économistes, décembre 1923)
Dans la suite de son commentaire, Guyot pointe du doigt les dépassements de budget des installations sportives comme la piscine olympique, et pose la question des responsabilités.
Benoît Malbranque
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