Les populations agricoles de la Toscane, étude d’économie rurale

Dans une livraison de la Revue des Deux Mondes, Paul Leroy-Beaulieu analyse le caractère économique de la Toscane. Région fortement montagneuse, propice à la culture des terres, mais troublée par des miasmes dangereux, cette terre intéresse aussi bien par son mode de culture que par les mœurs rustiques de ses habitants. Elle offre à l’auteur le visage de l’authenticité rurale, que la grande industrie va transformant à marche forcée.

La protection du mouton national

Dans ce court article publié en 1890, Ernest Martineau prouve que ce n’est pas sans fruit qu’il a pâli sur les ouvrages de Frédéric Bastiat. Avec vivacité et à-propos, il s’élève malicieusement le défenseur du mouton national — ce mouton, ce n’est autre que le bon consommateur que l’on spolie, que l’on pille, et sur le dos duquel les gros industriels et grands propriétaires s’enrichissent à l’abri des protections douanières. « Va, pauvre bête », dit-il alors, « nous qui savons tes maux et qui y compatissons, qui avons vu combien tu as été tondu dans le passé et qui voyons comme on s’apprête à te tondre de nouveau de plus en plus, jusqu’à t’écorcher, si tu souffres en silence, nous crierons pour toi. »

De l’instruction secondaire en France, de ses défauts, de leurs causes, et des moyens d’y remédier

En 1846, Frédéric Passy entre dans la carrière de l’économie politique en suivant les traces de son père, Hippolyte Passy, contributeur habituel du Journal des économistes et membre de l’Académie des sciences morales et politiques. Avec mesure et même une sorte de timidité, qui tranche avec ses prises de position audacieuses de la suite de sa carrière, il étudie alors les réformes à introduire dans l’instruction secondaire, vantant notamment l’introduction des sciences et des langues vivantes.

La métaphore sociale

Le langage politique est de plus en plus rempli, dit Yves Guyot en 1894, des métaphores et de l’épithète de « social ». Par ces mots et ces images d’une subtilité mal placée, ces hommes politiques pensent dire quelque chose ; en vérité ils ne font que montrer le grand défaut de précision de leurs idées.

Volney, un ‘idéologue’ au service des faits

Au sein du groupe des Idéologues, ces philosophes libéraux moqués et proscrits par Napoléon, Volney a brillé par son attachement à une démarche philosophique au contact des faits et des réalités de terrain. Dans cette vidéo, Benoît Malbranque retrace son parcours et examine ses principaux ouvrages, dont Les Ruines (1791), qui fournit l'occasion d'un voyage à Champlieu (commune d'Orrouy, 60129), au milieu des ruines d'une chapelle romane et d'un théâtre gallo-romain.

Compte rendu de Fresnais de Beaumont, Essai pour concilier les avantages de l’exportation des grains avec la subsistance facile.

En 1778, Nicolas Baudeau rend compte d’une énième brochure écrite dans le but d’organiser par des règlements contraignants le commerce des grains. Si son auteur, dit-il, avait compris le fonctionnement d’un marché libre et concurrentiel, il n’aurait pas pris cette peine. Il n’a eu en vue, à l’évidence, que les abus d’un système vicieux fait de vendeurs commissionnés et achetant avec de l’argent public : aussi s’est-il mépris, et a-t-il eu l’impolitesse de méprendre les autres par sa brochure.

Liberté et socialisme. Réponse à M. Jaurès

En 1899, Ernest Martineau, en fidèle disciple de Frédéric Bastiat, poursuit son combat contre le socialisme à travers les nouvelles formes qu’il revêt et dans la personne de ses nouveaux défenseurs. Face à Jean Jaurès, qui a poussé l’audace et l’indignité jusqu’à clamer que le socialisme représentait l’accomplissement de la liberté humaine, il rétablit le vrai sens des mots et la portée réelle des doctrines en présence. Le socialisme, quel qu’en soit les formes, aboutit en droite ligne au collectivisme et à l’effacement de la liberté humaine : à ce titre, les revendications de Jaurès ne sont qu’une plate hypocrisie.

De l’antisémitisme et du rôle des Juifs dans les sociétés modernes

À la fin du XIXe siècle, la montée en puissance de l’antisémitisme au sein de la population française, comme ailleurs en Europe, interroge les intellectuels libéraux, qui plaident pour la liberté religieuse et les droits individuels. À la Société d’économie politique, l’unanimité (chose assez rare) est obtenue sur ce thème : ce sont des préjugés et un protectionnisme d’une nouvelle sorte, affirme-t-on, qui favorisent l’antisémitisme. Toutefois, si tous les membres qui s’y expriment en 1893 en portent la condamnation formelle, l’avenir n’est pas conçu par tous dans les mêmes termes : certains espèrent un apaisement, voyant la liberté et la tolérance l’emporter ; d’autres anticipent des tragédies futures.

Les tarifs de chemins de fer et l’autorité de l’État (1880)

Comme la majorité des économistes libéraux de la seconde moitié du XIXe siècle présents dans les cercles officiels tels l’Académie des sciences morales et politiques, Léon Aucoc, auteur par ailleurs prolifique dans le Journal des économistes, défend un libéralisme modéré et consensuel, qui abandonne plusieurs facettes du programme des J.-B. Say ou des Bastiat. Ainsi, sur la question des chemins de fer, il n’est plus temps, d’après lui, de repousser l’intervention de l’autorité pour la délimitation des tracés, les mesures de sécurité ou le niveau des tarifs : il faut — et il agit dans ce sens dans cette étude de 1880 que nous republions — se borner à conseiller à l’État une maîtrise et une surveillance juste et sensée de cette sphère d’activité, qui dépend à présent de son pouvoir.

Laissons Faire, n°44, avril 2022

Au programme de ce nouveau numéro : Le pacifisme libéral du Nouveau Cynée (1623), par Benoît Malbranque. — Les syndicats et l'Association internationale des travailleurs, par Paul Leroy-Beaulieu (1870). — Rapport sur les projets d'impôts progressifs sur les successions et sur le revenu, par Ernest Martineau (1897). — Conférence sur la crémation, par Frédéric Passy (1890). — Recension critique : Germaine de Staël, Corinne ou l'Italie, réédition Classiques Garnier, 2022, 465 pages.

Dupont de Nemours et les débuts de la physiocratie

C'est à Chevannes, dans le Loiret, que Dupont (de Nemours) a passé la première partie de sa carrière d'économiste, ayant acheté sur ces terres une propriété qui le mettait à proximité géographique du marquis de Mirabeau, son collègue au sein de l'école de Quesnay. Dans cette vidéo, Benoît Malbranque revient sur sa trajectoire au sein du groupe physiocratique, dont il fut le plus jeune mais non le moins actif.

Relire ‘Corinne’ de Germaine de Staël

Dans son roman Corinne (1807), traduit dans de multiples langues et fréquemment réédité, Germaine de Staël offre une version d'elle-même dans un personnage féminin puissant et idéalisé, qui lui permet de travailler des notions toujours controversées comme la nationalité (opposé au cosmopolitisme, qu'elle revendique), ou encore le féminisme, dont toute son œuvre témoigne. S'inspirant librement de situations biographiques, le roman offre encore, par touches successives, une remise en cause très âpre du régime de Napoléon, alors régnant.

Les colonies et la politique coloniale de la France

En 1865, la parution d’un ouvrage sur ce thème est l’occasion pour Michel Chevalier d’engager devant l’Académie des sciences morales et politiques, où les libéraux sont majoritaires, une discussion sur les colonies et la politique coloniale de la France. Au sein de ce cercle du libéralisme officiel, le scepticisme envers le bien-fondé de la colonisation ne trouve pas de place : l’un après l’autre, les orateurs, tous célèbres pour leur contribution au libéralisme, étudient les raisons pour lesquelles la France peine encore à développer ses colonies, toujours d’après un présupposé partagé, que la colonisation est une visée noble pour la France.

L’abbé de Saint-Pierre, lecteur de Sully

Dans son fameux Projet de paix perpétuelle (1713, 1717), l'abbé de Saint-Pierre soutient, citations à l’appui, que Sully et Henri IV avaient eu en leur temps le même projet que lui : former une alliance des États européens qui se garantiraient les uns les autres la possession tranquille de leur territoire respectif, afin de mettre fin à toute guerre offensive.

L’influence de la spéculation sur les cours des produits agricoles en France

En 1905, la Société d’économie politique, avec notamment Paul Leroy-Beaulieu et Yves Guyot, met en débat la question de la spéculation et des trusts ou ententes, et de leurs effets sur le mouvement des prix. La couverture des risques, rendue possible par la spéculation et les marchés boursiers, est saluée comme utile et bénéfique ; quant aux trusts, l’expérience n’est pas lue par tous de la même manière ; la condamnation de l’entente, de la part de penseurs qui se signalent par leur attachement pour la liberté, apparaît même comme quelque peu contre-intuitive.

Conférence sur le capital (1895)

Tandis que dans les publications socialistes et les discours politiques de ceux qui font commerce d’une opposition bien sensible entre exploiteurs et exploités, le capital est présenté comme un vampire, s’engraissant par les efforts non-payés des salariés, Yves Guyot expose, dans une conférence populaire, ce qu’est le capital, et ce qu’il peut faire pour la prospérité nationale lorsqu’on ne lui fait pas la guerre.

Jean-Jacques Rousseau, ami et ennemi des libéraux français

Jean-Jacques Rousseau, qui se présente comme un ami de la liberté dans ses écrits, et qui parfois la défend très correctement, a aussi été l’un de ses plus dangereux ennemis, notamment dans ses écrits politiques comme le Contrat social. Son influence sur le mouvement libéral français a aussi été divers, fait d'admiration et de répulsion, de proximité et d'excommunication.

Les trade’s unions et l’Association internationale des travailleurs

À la veille de l’embrasement révolutionnaire de la Commune de 1870, le jeune Paul Leroy-Beaulieu analyse le développement des syndicats ou trade’s unions en Angleterre, ainsi que la récente organisation française, aux allures menaçantes, connue sous le nom d’Association internationale des travailleurs. Il examine ses procédés de combat social et les déceptions qu’amènent leur remue-ménage et leurs convictions hostiles. 

L’écologie dans la tradition libérale française

Les grands auteurs qui ont fondé en France la doctrine du libéralisme étaient en grande majorité des ruraux, attentifs à la nature. Dans le domaine des idées, ils ont traité (parfois en vrais pionniers) de thèmes authentiquement écologistes, mettant en avant des convictions étonnantes, et aboutissant à revendiquer, par exemple chez Paul Leroy-Beaulieu, au XIXe siècle, un rôle de protection par l'État des ressources et des richesses du territoire de la France.

Alexis de Tocqueville, un «libéral d’une espèce nouvelle»

Contre les libéraux de son temps, antireligieux pour les uns, et qui feraient pour les autres « bon marché du libre arbitre et des lois pour pouvoir dormir tranquilles dans leur lit », Tocqueville se place en libéral d’une espèce nouvelle, ami de la morale et de la religion, comme il l’explique à son ami Eugène Stöffels dans cette lettre rédigée à l’été 1836.