Oeuvres de Turgot – 063 – Questions diverses

63. — QUESTIONS DIVERSES[1].

I. — Statistique médicale.

CIRCULAIRE (AUX MÉDECINS ?)

[A. municipales de Tulle[2].]

(Demande d’envoi de statistiques mensuelles.)

Limoges, février.

La conservation des hommes étant, M., un des objets les plus importants qu’on puisse se proposer, rien ne mérite plus de fixer votre attention que tout ce qui a quelque rapport à cette fin. Votre ministère vous met à portée plus particulièrement que personne de connaître ce qui peut y concourir. Vous êtes dans le cas de faire une foule d’observations sur la nature des maladies que vous avez à traiter, sur les remèdes que vous employez pour les guérir et sur les effets qui en résultent ; et si l’on rassemblait sous un même point de vue celles que chaque médecin a occasion de faire dans les différentes circonstances où il se trouve, on pourrait par la comparaison des unes avec les autres, voir quelles sont les méthodes qui, dans les mêmes maladies, réussissent le plus généralement et en tirer des conséquences qui ne pourraient que tourner à l’avantage de l’humanité.

C’est dans cette vue, M., que M. le duc de Choiseul demande que vous lui envoyiez, au commencement de chaque mois, celles que vous aurez eu occasion de faire sur les différentes maladies qui ont régné le mois précédent. Il faudra faire mention des remèdes que vous aurez employés en distinguant ceux qui auront le mieux réussi. Pour juger plus particulièrement de leur effet, il sera à propos de faire faire l’ouverture de plusieurs cadavres. Vous aurez soin aussi de lui marquer les précautions que vous aurez prises pour empêcher la communication et le progrès des maladies. Les mémoires que vous lui adresserez seront examinés par un homme très habile et très expérimenté et il vous fera part de son sentiment sur la manière dont vous vous serez conduit. Je vous serai aussi obligé de m’envoyer un double de ces mémoires.

Vous ne pouvez, M., donner à M. le duc de Choiseul une meilleure preuve de votre bonne volonté et de votre zèle pour le bien de l’humanité : ce sera d’ailleurs une occasion pour vous de lui faire connaître votre capacité et de le mettre en état de vous distinguer de la foule, en vous donnant les récompenses que vous pourrez mériter par vos talents et votre ardeur à remplir ses vues.

II.— Cours d’accouchement à Limoges.

CIRCULAIRE AUX CURÉS.

[A. Corrèze, C. 1.]

(Ouverture d’un cours.)

Paris, 1er août.

J’apprends avec peine, M., que les habitants de votre paroisse, n’ont point profité de l’avis que je vous avais prié de leur communiquer sur le cours d’accouchement que Mme du Coudray[3] a donné à Limoges ; l’objet de la dépense d’une élève qui se réduit à 13 ou 14 livres par mois, est si modique qu’il n’y a qu’une nonchalance blâmable qui ait pu faire négliger à vos paroissiens cette occasion de se procurer une ressource aussi nécessaire pour la conservation de leurs femmes et de leurs enfants. Je ne vous dissimule pas que je suis affligé de ce qu’ils n’ont point profité du service important que je désirais leur rendre ; je veux cependant les mettre encore une fois à portée de réparer leur négligence, en engageant Mme du Coudray à ouvrir un second cours d’accouchement. Celui qu’elle vient de donner n’a pas été aussi nombreux que je l’aurais souhaité ; mais les élèves qui le composaient y ont fait des progrès très satisfaisants, et il y a lieu d’espérer que les connaissances qu’elles y ont acquises, les mettront en état de se tirer avec succès des cas les plus embarrassants.

Persuadé qu’un second cours sera plus nombreux et deviendra encore plus utile à la Province, je me propose en conséquence de le faire commencer à Limoges le 1er septembre prochain. Je ne doute pas que votre zèle ne vous porte à engager vos paroissiens à envoyer une élève à Mme du Coudray, capable de profiter de ses leçons et à sacrifier, à un art qui leur sera si utile, une dépense de 26 à 28 livres pour la nourriture de cette élève pendant deux mois que durera ce cours ; la levée de cette somme pourrait être faite par le moyen d’une quête dont vous prendriez la peine de vous charger. Je suis persuadé que toutes les personnes un peu aisées de votre paroisse contribueront avec plaisir à une aussi bonne oeuvre, mais si vos paroissiens préféraient une répartition de cette dépense proportionnée à leurs facultés, vous pourriez leur faire prendre une délibération en papier non timbré ; il me suffirait qu’elle fût signée des principaux, et j’ordonnerais volontiers la répartition de la somme qu’ils demanderaient à employer pour l’instruction de la personne qu’ils auraient choisie pour assister au cours d’accouchement de Mme du Coudray.

J’ai fait réimprimer l’avis que je vous avais déjà envoyé : j’en joins ici quelques exemplaires avec un modèle de la délibération que vous pourrez proposer à vos paroissiens dans le cas où cette quête ne produirait pas les fonds nécessaires pour la subsistance de la personne qu’ils enverraient aux leçons de Mme du Coudray.

Comme je désire de former un état des paroisses qui se seront prêtées à une aussi bonne œuvre, je vous prie de me mander bien exactement les dispositions de vos paroissiens à cet égard, en continuant de m’adresser vos lettres à Limoges avec le mot Bureau[4].

III. — Épizooties.

[A. H. V., C. 25.]

CIRCULAIRE AUX CURÉS.

(Mesures à prendre contre une maladie des bêtes à cornes.)

Limoges, 9 mars.

Je vous envoie. M., plusieurs exemplaires d’un avis que j’ai fait imprimer concernant une maladie qui vient de se répandre sur les bêtes à cornes. Je vous prie de donner à cet avis toute la publicité possible, et d’engager vos paroissiens à faire usage du remède et des précautions qui y sont indiquées. Il est heureux que ce remède soit assez simple et assez sûr pour faire espérer que cette maladie n’aura pas de suite dangereuse et permettra de ne point interrompre un commerce aussi essentiel à cette province que celui des bestiaux. Comme j’imagine que le vinaigre peut ne pas se trouver en quantité suffisante pour suffire à cette consommation extraordinaire dans les paroisses de la campagne, j’ai écrit à mes subdélégués de prendre les mesures nécessaires pour en procurer à ceux qui en auraient besoin, et vous pourrez vous adresser à celui de la ville la plus voisine de votre paroisse.

Je vous serai obligé d’avoir, en particulier, la plus grande attention à engager vos paroissiens à interrompre la communication entre les bestiaux sains et les malades et à visiter exactement soir et matin la langue de tous leurs bestiaux sans exception ; s’il se passait dans votre paroisse quelque chose d’important relativement à cet objet ou que la maladie parut exiger des précautions encore plus grandes, je vous prie d’en écrire sur-le-champ à M. de Beaulieu.

IV. — Haras de Pompadour.

(D’après l’Inventaire sommaire des Archives de la Haute-Vienne, ce haras fut créé en 1763 sous l’intendance de Turgot, mais on ne sait quelle part Turgot a prise à la création.)

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[1] On trouve aux Archives de la Haute-Vienne une lettre à De La Porte, commissaire à Brive (février 1763), repoussant une demande d’exemption des contributions aux dépenses du fourrage par des officiers de maîtrises ; elle est dénuée d’intérêt.

[2] Communiqué par M. Lafarge, auteur de l’Agriculture en Limousin au XVIIIe siècle et l’intendance de Turgot.

[3] « Sage-femme instruite et expérimentée que Turgot avait fait venir à Limoges. Il lui assura un traitement honnête et lui fournit les fantômes nécessaires pour faire plusieurs cours de l’art des accouchements à Limoges, à Tulle et à Angoulême. Il donna des encouragements aux femmes qui suivirent ces cours et favorisa en divers endroits de la Province, l’établissement de celles qui avaient le mieux réussi. Il parvint ainsi à former une pépinière de sages-femmes suffisamment éclairées et les accidents devinrent bien plus rares. Ce fut l’origine de l’École d’accouchement si noblement entretenue à l’Hospice de la Maternité (Du Pont, Mém, 103). »

[4] Cette lettre donne la preuve qu’avait vainement cherchée M. Leroux (Inventaire des Archives de la Haute-Vienne, CXXXXV) que les cours d’accouchement de Limoges remontent à l’Intendance de Turgot.

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