1751-1754
30. — DÉCISIONS RELATIVES À LA SITUATION DE TURGOT, COMME MEMBRE DU PARLEMENT ET COMME MAÎTRE DES REQUÊTES.
I. — Lettre de provisions à Turgot d’un office de conseiller substitut du procureur général au Parlement de Paris.
Décembre 1751.
[Cette lettre n’a pas été retrouvée.]
II. — Lettre de provisions à Turgot d’une charge de Conseiller Lay au Parlement.
[A. L., expédition notariée.]
Versailles, 30 décembre 1752.
Louis, par la grâce de Dieu,
À tous ceux qui ces présentes verront, salut :
Nous accordâmes au mois de décembre de l’année dernière à notre cher et bien-aimé le sieur Anne-Robert-Jacques Turgot nos lettres de provisions d’un office de notre Conseiller substitut de notre Procureur général en notre Cour de Parlement de Paris, et aujourd’hui nous sommes si satisfaits de son exactitude et de son premier travail que nous avons cru devoir lui donner notre agrément pour la charge de Conseiller Lay en notre Cour de Parlement que lui a résignée notre amé et féal le sieur Étienne-François d’Aligre. Le choix que nous avons fait en faveur dudit sieur Turgot pour ladite charge de Conseiller doit être pour lui une marque de la confiance que nous donnent ses bonnes qualités et ses talents, et doit être aussi un témoignage de l’estime et de la satisfaction que méritent les services que nous rend le sieur Turgot son frère, en qualité de Président de notre cour de parlement, ceux que nous a rendus le feu sieur Turgot, leur père, en qualité de Prévôt des marchands de la ville de Paris et de Conseiller d’État ordinaire, et ceux que leurs ancêtres ont rendus à notre État dans nos cours et dans nos conseils et dans les différentes places dont les ont honorés les Rois nos prédécesseurs.
À ces causes… nous avons, audit sieur Anne-Robert-Jacques Turgot, donné et octroyé ledit état et office de notre Conseiller Lay… dont il a payé, en nos revenus casuels, le droit de survivance, en exécution de l’édit du mois de décembre 1709 et de la déclaration du 9 août 1722, et que tenait ledit sieur Étienne-François d’Aligre, qui en jouissait à titre de survivance et qui en a fait la résignation en faveur dudit sieur Turgot par acte du 14 novembre dernier… pour ledit office avoir, tenir et exercer, en jouir et user… à condition toutefois que ledit sieur Turgot ait atteint l’âge de vingt-cinq ans accomplis suivant son extrait baptistaire du 10 mai 1727… et pourvu que ledit sieur Turgot n’ait dans le nombre des officiers de notre Cour du Parlement aucun autre parent ni allié aux degrés prohibés par nos ordonnances que notre amé et féal le sieur Michel-Jacques Turgot son frère… et quant au degré de parenté qui est entre lesdits sieurs Anne-Robert-Jacques Turgot et ledit sieur Turgot, son frère, président de notre Cour, nous l’en avons relevé et dispensé par nos lettres du 9 du présent mois… à condition cependant que la voix dudit sieur Anne-Robert-Jacques Turgot ne sera comptée que pour une avec celle dudit sieur son frère lorsqu’elle s’y trouvera conforme… [1]
III. — Lettre accordant à Turgot une dispense d’âge et de services pour une charge de maître des requêtes.
[A. L., original.]
Versailles, 10 mai 1753.
Louis, à notre amé et féal le sieur de Lamoignon, Chancelier.
Notre amé et féal Anne-Robert-Jacques Turgot, sieur de Brucourt, Conseiller en notre Cour de Parlement, a fait représenter qu’il souhaiterait se faire pourvoir d’une charge de notre Conseiller en nos Conseils, maître des requêtes ordinaire de notre Hôtel, mais que n’étant âgé que de vingt-six ans et quelques jours, suivant son extrait baptistaire du 10 mai 1727, et n’ayant exercé l’office de Conseiller dont il est revêtu que depuis le 11 janvier dernier qu’il y a été reçu, il aurait besoin de nos lettres de dispense de ce qui lui manque non seulement de l’âge de trente et un ans accomplis, mais encore du service des six années requis par nos édits… et nous a très humblement supplié de les lui accorder.
À ces causes, voulant favorablement traiter ledit sieur Turgot de Brucourt et lui donner de nouvelles marques de l’estime et de la confiance que méritent ses talents et les services que nous a rendus le feu sieur Turgot, son père, dans les charges qu’il a remplies en qualité de Prévôt des marchands de notre bonne ville de Paris et de Conseiller d’État ordinaire et de ceux qu’ont de même rendus ses ancêtres dans nos cours, dans nos Conseils et dans les différentes places dont les Rois nos prédécesseurs les ont honorés.
Nous vous mandons, par ces présentes signées de notre main, que lorsque ledit sieur Turgot de Brucourt vous fera apparoir de nos lettres de provisions dudit état et office… vous ayez à l’y recevoir sans vous arrêter à ce qui lui manque des trente et une années d’âge et des six années de service.
IV. — Lettre approuvant l’acquisition par Turgot d’une charge de maître des requêtes.
[A. N., Extrait des registres du Conseil d’État.]
Marly, 22 mai 1753.
Sur la requête présentée au Roi en son Conseil par Anne-Robert Jacques Turgot, sieur de Brucourt, Conseiller au Parlement, contenant que Sa Majesté, ayant réduit par édit du mois d’août 1752 au nombre de 80 les offices de maîtres des requêtes ordinaires de son hôtel et ordonné entre autres choses qu’à l’avenir ceux qui auraient obtenu l’agrément de Sa Majesté pour desdits offices seraient tenus de consigner aux revenus casuels la somme de 100 000 livres à laquelle le prix de chacun des offices demeurerait irrévocablement fixé, le suppliant, après avoir obtenu l’agrément de Sa Majesté pour l’un desdits offices a consigné au bureau des revenus casuels la somme de 100 000 livres le 16 avril dernier… en sorte qu’il a satisfait en ce qui est ordonné par l’édit…
Le Roi étant en son Conseil…
Le suppliant sera pourvu de celui desdits offices qui se trouve aujourd’hui vacant par la démission du sieur Camus de Pontcarré de Viarme… sans qu’il soit tenu de prendre et de rapporter le consentement ni la démission dudit sieur de Viarme, sauf audit sieur de Viarme ou de ses ayant cause à retirer des revenus casuels… les deniers consignés.
V. — Lettre de provisions à Turgot d’une charge de maître des requêtes.
[A. L., expédition.]
Versailles, le 28 mai 1753.
Louis, à tous ceux qui ces présentes verront, salut :
Après les services qu’avait rendus notre amé et féal Anne-Robert-Jacques Turgot, sieur de Brucourt, pendant plus d’une année en qualité de substitut de notre Procureur général en notre cour de Parlement de Paris, nous lui accordâmes au mois de décembre dernier les provisions de la charge de conseiller lay en notre Cour de Parlement dont il est actuellement revêtu et dans laquelle il s’est distingué par son exactitude et ses talents. On nous a aujourd’hui rendu de si favorables témoignages dudit sieur Turgot de Brucourt que nous sommes résolus de l’appeler dans nos conseils et de le pourvoir d’une charge de Maître des Requêtes ordinaire de notre hôtel, en sorte que par ce moyen nous nous assurerons pour l’avenir les services qu’on doit attendre de lui et nous reconnaîtrons ceux que nous a rendus le sieur Turgot, son père, dans les charges qu’il a remplies en qualité de Prévôt des marchands de la ville de Paris et de Conseiller d’État ordinaire et ceux que ses ancêtres ont rendus à notre État dans nos Cours et dans les différentes places dont les Rois nos prédécesseurs les ont honorés.
À ces causes, nous avons audit sieur Anne-Robert-Jacques Turgot donné… l’état et office de notre Conseiller en nos Conseils, Maître des requêtes ordinaire de notre hôtel dont il a payé, en nos revenus casuels, le droit de survivance en exécution de l’édit du mois de décembre 1709 et de la déclaration du 9 août 1722 et que tenait le sieur J.-B. le Camus de Pontcarré de Viarme… duquel nous avons donné l’agrément audit sieur Turgot de Brucourt et ordonné par arrêt du Conseil du 22 du présent mois que les provisions lui en seraient octroyées au moyen de la consignation qu’il a faite entre les mains du sieur Bertin, trésorier général de nos revenus casuels, de la somme de 100 000 livres à laquelle nous avons fixé par édit du mois d’août de l’année dernière le prix de chacun des offices de maître des requêtes. Pour le dit état et office, avoir, tenir, exercer.
Encore bien que ledit sieur Turgot de Brucourt ne soit âgé que de vingt-six ans et un mois et quelques jours, suivant son extrait baptistaire du 10 mai 1727, délivré le 14 décembre 1751 par le vicaire de la paroisse de l’église paroissiale de Saint-Nicolas-des-Champs à Paris… et quant à ce qui manque audit sieur Turgot de Brucourt des trente et une années d’âge et des six années de service requises par nos ordonnances, l’en avons relevé et dispensé par notre lettre du 10 et du présent mois. Si donnons mandement[2]…
VI. — Institution d’office par le Roi d’une Chambre des Vacations au Parlement de Paris et nomination de Turgot à cette Chambre.
[Isambert, Anciennes lois françaises.]
(Versailles, 18 septembre 1753.)
Le 5 mai, le Parlement arrêta de cesser son service. Le 9 mai, quatre conseillers furent arrêtés chez eux à 4 heures du matin par des officiers de mousquetaires et envoyés dans des prisons d’État ; sept autres conseillers furent exilés dans des localités désignées ; quatorze autres furent envoyés dans leurs terres.
Le 10, la Grand’Chambre fut transférée à Pontoise ; elle y tint séance au mois de juillet ; le président Michel-Jacques Turgot, marquis de Sousmont, assista aux délibérations.
Mais le Parlement avait, le 7 avril, refusé d’obéir à l’ordre de reprendre son service et avait à Pontoise renouvelé ses arrêtés ; les vacances arrivèrent sans que la Chambre des vacations ait été organisée. C’est pour ne pas interrompre le cours de la justice qu’une Chambre des vacations fut instituée d’office par le Roi. Elle fut ainsi composée :
Conseillers d’État.
Feydeau de Brou. Le Peletier de Beaupré.
Poulletier. Pallu.
Feydeau de Marville. Pontcarré de Viarme.
Maîtres des requêtes.
Poncher. Cypierre.
Maboul. Pajot de Marcheval.
Choppin d’Arnouville. Boullongne.
Bignon. Miromesnil.
Baillou. Feydeau de Brou.
D’Argonges. Pongret de la Blinière.
Maynon d’Invau. De Gourgues.
De Bérulle. Turgot.
Boutin. Rouillé d’Orfeuil.
De la Corée. Amelot de Chaillou.
VII. — Lettres patentes instituant une Chambre Royale[3] pour remplacer provisoirement le Parlement et nommant Turgot à cette Chambre.
(1er novembre 1753)
Le Parlement n’ayant pas repris son service après les vacances, et la Grand’Chambre ayant été exilée à Soissons, il fut institué une Chambre Royale pour connaître de toutes les affaires civiles et criminelles et de police du ressort du Parlement. La Chambre Royale fut ainsi composée :
Conseillers d’État (18).
Lefèvre d’Ormesson, président. D’Aguesseau de Fresnes.
Tachereau de Baudry. De Trudaine.
Feydeau de Brou. Poulletier.
Chauvelin. Gilbert des Voysins.
D’Aguesseau. Bidé de la Granville.
De Fontanieu. Pallu.
Feydeau de Marville. De Vanolles.
Barberie de Courteilles. Castanier d’Auriac.
Le Peletier de Beaupré. Pontcarré de Viarme.
Maîtres des requêtes (40).
Poncher. Maynon d’Invau.
Maboul. De Bérulle.
Choppin d’Arnouville. B Bernard de Balanvilliers.
Bertier de Sauvigny. Boutin.
Gagnat de Longny. Le Nain.
Bignon. Lefèvre de Caumartin.
Gagne de Perigny. De la Corée.
Boula de Quincy. De Cypierre.
L’Escalopier de Nouras. Pajot de Marcheval.
Merault de Villeron. De Chaumont de la Galaisière
Thiroux. De Boullongne.
Thiroux d’Esperennes. Dedelay de la Garde.
Baillou. Hué de Miromesnil.
De Montaran. Feydeau de Brou.
Dufour de Villeneuve. De Fontanière.
Bertin. Pongret de la Blinière.
Silhouette. De Gourgues.
Poulletier de la Salle. Turgot.
D’Argonges de Fleury. Rouillé d’Orfeuil..
Bourgeois de Boynes. Amelot de Chaillou.
Faisant fonctions de procureur général : Bourgeois de Boynes.
Avocats généraux : Feydeau de Brou, Amelot.
VIII. — Suppression de la Chambre Royale, et rétablissement du Parlement.
30 août 1754. — Lettres Patentes supprimant la Chambre Royale.
[Isambert, Anciennes lois françaises.]
20 août et 2 septembre 1754. — Déclaration Royale rétablissant le Parlement.
[A. N., X8, 288. Registre de la Chambre des Enquêtes.]
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[1] L’expédition porte que Turgot prêta le serment accoutumé, le 11 janvier 1753.
[2] Turgot prêta serment le même jour. Il avait versé pour les provisions 5 775 livres et pour le droit de marc d’or, avec 4 sols pour livre, 1 296 livres. Les 100 000 livres du prix de l’office lui furent remboursés le 1er septembre 1775. Le traitement des maîtres de requêtes était de 4 à 5 000 livres, souvent moins.
[3] Turgot rapporta un assez grand nombre d’affaires à la Chambre Royale. La plus importante nous a paru être une affaire Michel Levy, banquier à Pichery, près Strasbourg, rapportée le 30 mars 1754 [A. N., Y 13, 9 686]
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