Vers la fin du XIXe siècle, la hausse apparente du coût de la vie, dans les villes surtout, sert de prétexte à des attaques contre le libre-échange et l’économie de marché. D’après les économistes libéraux de la Société d’économie politique, cette accusation est maladroite, car elle compare des réalités extrêmement différentes : les modes de vie ont évolué, et le luxe d’hier est devenu nécessité ; ainsi ce n’est pas une enrichissement, mais un raffinement de la vie qui a eu lieu véritablement.
Le renchérissement de la vie
Société d’économie politique. Réunion du 5 septembre 1880
(Journal des Économistes, septembre 1880.)
Après ces communications, la réunion pense qu’elle ferait bien de profiter de la présence de M. Marchal, qui habite Laval, pour le prier de développer la question suivante inscrite en son nom au programme.
LE RENCHÉRISSEMENT DE LA VIE.
La question est ainsi formulée au programme : « Dans quelle proportion la vie est-elle devenue plus chère ; quelle est la cause de ce renchérissement ? »
M. Marchal, auteur de la proposition, s’exprime en ces termes :
De tous côtés s’élèvent des doléances sur le renchérissement de la vie. Ce sont les ménagères (ce mot étant pris dans sa meilleure acception) qui s’en plaignent le plus vivement.
Les partisans du renchérissement artificiel attaquent les économistes en leur disant : « Vous aviez promis le bon marché par la liberté du commerce, nous n’avons obtenu que la vie plus chère ; laissez-nous appliquer la théorie contraire, elle ne fera pas pis ».
Il est bon d’examiner si ces doléances sont fondées, si réellement la vie est devenue plus chère, et dans le cas de l’affirmative d’évaluer ce renchérissement et d’en rechercher la cause.
C’est ce que je me propose de faire aussi brièvement que possible pour ne pas abuser de votre bienveillante attention.
Pour résoudre ce problème complètement il faudrait prendre deux ou plusieurs époques bien déterminées, séparées par un assez long intervalle (cinquante ans, par exemple), comparer les prix des objets nécessaires à la vie à ces époques, puis prendre chacune des classes de la société, examiner ce qu’elles consommaient autrefois, ce qu’elles consomment aujourd’hui et faire le compte d’après les prix respectifs. Mais pour traiter ainsi le sujet dans toute sa généralité il faudrait des volumes et nous ne disposons que de quelques heures. Je me bornerai donc à des considérations sommaires les plus propres à étayer des conclusions qui, je l’espère, ne vous paraîtront pas trop paradoxales.
Il est d’autant plus nécessaire d’examiner cette question que l’on se fait de tous côtés une arme de ce prétendu renchérissement pour dénigrer la société ou tirer sur le budget de l’État, dont la panse est cependant déjà suffisamment arrondie.
S’il était vrai que la vie eût renchéri dans les proportions que nous entendons tous les jours énoncer, savoir du simple au double ou au triple, il s’ensuivrait qu’avec un doublement ou un triplement de revenus soit territoriaux soit industriels, qui est à peu près la proportion existante depuis un demi-siècle, on ne pourrait se procurer aujourd’hui que strictement la quantité d’objets que l’on se procurait il y a 50 ans avec des revenus moitié moindres. Mais alors avec quoi paierait-on le luxe, le confortable, les innombrables superfluités si en faveur aujourd’hui et qui sont déjà presque devenus des nécessités ?
Il est donc évident a priori que le renchérissement des objets indispensables à la vie a été fort exagéré.
Les nécessités de la vie se composent de la nourriture, du vêtement, du logement, du chauffage, de l’éclairage et des distractions.
Je crois pouvoir ranger dans une certaine mesure les distractions parmi les nécessités de la vie parce qu’elles ont existé de tout temps, dans tous les pays, même chez les peuplades les moins civilisées de l’Afrique et de la Polynésie.
Je passerai succinctement en revue chacun de ces objets.
La nourriture a chez nous pour base le pain qui n’a pas enchéri ; bien que la comparaison des mercuriales semble accuser une légère augmentation dans les prix du pain et du grain, je crois pouvoir affirmer que la fixité des prix du pain aujourd’hui, grâce à la liberté du commerce, fait plus que compenser la légère augmentation accusée par les mercuriales. Nous avons tous vu sous le régime de l’échelle mobile le grain passer presque subitement de prix extrêmement bas à des prix excessivement élevés, de 15 fr. à 45 fr. l’hectolitre. Or, ces variations excessives étaient on ne peut plus préjudiciables à l’existence des classes les plus intéressantes de la société, parce qu’elles sont les moins fortunées. Le pain à 0 fr. 30 le kg ne compensait pas en pratique le prix de 0 fr. 70 à 0 fr. 80, tandis qu’aujourd’hui, même dans les années les moins favorables, le prix s’éloigne peu de 0 fr. 40, prix normal.
La viande, le beurre et les œufs sont les trois seuls objets d’alimentation générale pour lesquels on puisse constater une augmentation réelle assez considérable puisqu’elle est de 50 à 80%. Cependant ces trois produits agricoles ont été fort multipliés depuis 50 ans.
Les bas morceaux de viandes, dont se contentait autrefois une partie notable de la population, ne lui suffisent plus. Les morceaux de choix sont de plus en plus recherchés. Je suis loin de blâmer cette recherche, qui profite à la santé et au développement des forces ; mais il ne faudrait pas en faire un thème d’accusation contre les conséquences de la liberté du commerce.
Il en est de même du beurre. Il y en a à tous prix, mais chacun veut du beurre fin, et la concurrence dans la consommation de ce produit devait nécessairement le faire enchérir, malgré l’augmentation considérable de la production.
Il arrive en ce moment de grandes quantités de lard et de graisses d’Amérique à l’usage des petites bourses, et cependant jamais les porcs indigènes n’ont été si recherchés et si chers. Ce résultat ne surprend pas les économistes qui voient dans ce double fait la confirmation de leurs prévisions.
Les œufs ont à peu près doublé de prix partout malgré la grande extension de la production, parce que tel dont le père se contentait d’un œuf dur avec un morceau de pain de deuxième qualité exige aujourd’hui une omelette avec du pain de première qualité et même du pain de luxe.
Les légumes et les fruits sont extrêmement abondants et d’un prix très minime, surtout à Paris et dans la plupart des grandes villes.
Le poisson de mer, qui ne pouvait être consommé que dans le voisinage des côtes, faute de moyens rapides de transport, arrive aujourd’hui dans les villes de tous les ports, même de ceux de la Méditerranée, tous les jours, quelle que soit la température. Son prix, pour qui sait se contenter des espèces abondantes, a considérablement baissé. Il n’y a plus de risque pour nos modernes Vatels.
La boisson, qui est un des éléments les plus importants de l’alimentation, subit des fluctuations de prix considérables suivant l’abondance des récoltes. Le vin ordinaire de table était à très bon compte il y a quelques années, malgré l’énormité des droits d’octroi, de débit, de circulation, de congé, etc. Il a renchéri depuis peu, par suite de deux fléaux temporaires, l’oïdium et le phylloxéra ; mais ces deux fléaux céderont avant peu aux efforts de la science. Le remède à l’oïdium est déjà trouvé, celui du phylloxéra ne tardera pas à l’être.
Le cidre, qui est la boisson d’un quart de la France, a subi depuis trois ans un renchérissement tout accidentel, dû aux gelées tardives de printemps exceptionnels. Mais il y a moins de dix ans, l’hectolitre de cidre dans les pays de production ne valait pas plus de 10 fr. Il en vaut 30 en ce moment et reviendra à son taux primitif quand les circonstances exceptionnelles qui le font enchérir en ce moment auront cessé. On ne peut donc pas arguer contre les doctrines économiques d’un fait tout accidentel et temporaire.
Les impôts, soit généraux, soit locaux, ont sévi et sévissent encore particulièrement sur ce genre de consommation. Les mesures récemment votées en amoindriront l’effet ; mais il ne faut pas perdre de vue que ces impôts ont servi et servent à payer les fautes politiques et permettent aux villes de pourvoir à l’assainissement, à l’aération, à la propreté, à la création de jardins publics et à une multitude de jouissances toutes gratuites qui étaient inconnues à nos pères, et qui sont devenues une nécessité, car elles contribuent à l’accroissement de la durée de la vie.
Il resterait encore bien à dire sur cette partie du sujet ; mais je ne veux pas abuser et je suis forcé d’abréger. Je passe donc au vêtement, autre nécessité impérieuse de l’existence.
Le prix des étoffes de toute nature, lainages, colonnades, soieries a considérablement diminué et les hommes qui ont eu le bon sens de ne pas compliquer leurs vêtements, de les simplifier, au contraire, pour s’y trouver plus à l’aise, peuvent se vêtir à très bon compte, à la condition seulement de payer comptant.
Il n’en est malheureusement pas de même pour les femmes, dont la toilette est un des objets qui fait le plus crier contre le prétendu renchérissement de la vie. Ce sont les dépenses exorbitantes de la toilette qui troublent tant de budgets particuliers et font hésiter tant de jeunes gens à contracter mariage devant M. le maire.
Cependant le prix des étoffes féminines a encore plus baissé que celui des étoffes masculines ; mais la mode, cet inexorable tyran, contre lequel il n’y a pas d’insurrection possible, a tellement compliqué les façons, les fioritures, tellement augmenté la quantité d’étoffe nécessaire que la réduction des prix s’est trouvée bien plus que compensée par les exigences des couturières élevées au rang d’artistes.
Jadis une mère de famille pouvait avec l’aide de ses filles ou le concours d’une femme de chambre pourvoir à la confection de l’habillement féminin de toute la maison. Aujourd’hui ce n’est plus possible, et si vous engagez une femme, si économe qu’elle soit, à s’affranchir de cette tyrannie, elle vous répondra par cet argument sans réplique : Il faut bien être comme tout le monde.
La quantité d’étoffe nécessaire à l’habillement d’une femme du monde est quelque chose de prodigieux.
J’avais lu un jour dans un journal humoristique que pour habiller une femme du grand monde il fallait autant d’étoffe que pour habiller la colonne Vendôme. J’ai cru à une exagération, j’ai voulu en avoir le cœur net. J’ai pris les dimensions du monument (je ne parle ici que du fût, non compris le piédestal et la corniche, car il ne faut rien exagérer) et j’ai trouvé que le calcul était parfaitement exact.
On prétend, il est vrai, que les étoffes sont moins bonnes et moins durables ; mais pourquoi les fabricants s’appliqueraient-ils à faire des étoffes solides puisqu’elles sont démodées avant d’être usées ?
Je n’insisterai pas davantage sur ce sujet brûlant, ne voulant pas me brouiller absolument avec la moitié la plus belle et la plus influente du genre humain.
Je passe aux logements.
En apparence le prix des logements s’est considérablement accru ; mais si l’on veut aller au fond des choses, on verra que cet accroissement est plus apparent que réel.
Sans doute pour les personnes que leurs affaires ou le goût des plaisirs retiennent au centre des villes, le prix des logements semble avoir beaucoup augmenté, mais comparons ce que sont ces logements, pourvus de tout le luxe et le confortable imaginables avec ce qu’étaient il y a cinquante ans les appartements dont se contentaient les familles bourgeoises ? Il reste encore dans quelques quartiers des villes, des spécimens de ces logements où l’on se croyait à l’aise et dont aujourd’hui personne ne veut, et qui servent de magasins ou d’ateliers.
Une famille d’artisans peut, grâce aux facilités de communications, habiter des quartiers qui passaient autrefois pour excentriques, et même la banlieue et y trouver des logements plus sains, plus confortables, plus aérés, quelquefois même accompagnés de jardins, au même prix que l’on payait autrefois dans le centre des bouges infects sans air, sans lumière, foyers d’émanations malsaines. Les anciens faubourgs de Paris étaient, il y a cinquante ans, plus éloignés du centre que ne le sont, grâce aux omnibus, aux tramways, aux chemins de fer, les communes suburbaines, et le même fait se produit dans les grandes villes.
Telle famille dont le père se contentait de trois ou quatre pièces exige aujourd’hui chambre à coucher de madame, chambre à coucher de monsieur, boudoir de madame, cabinet ou fumoir de monsieur, une ou deux chambres pour les enfants, grand et petit salon, salle à manger, cuisine, office et logements dans les combles pour les domestiques avec la promiscuité qui est la conséquence de cet isolement ; tous les appartements sont garnis de glaces et lambrissés, parquetés, tapissés et ornés de mobiliers à l’avenant. Tout cela coûte sans doute, et fort cher, cela doit être. Ce luxe, ce confortable sont peut-être devenus une nécessité ; mais ne mettons pas cette dépense plus ou moins de convenance au compte du renchérissement de la vie. C’est à chacun à mesurer la satisfaction de ce nouveau besoin sur ses revenus. Que chacun s’applique à régler sa maison de manière à dépenser un peu moins que ses recettes et l’équilibre des budgets individuels ne sera pas dérangé aussi souvent qu’il l’est.
L’éclairage aurait beaucoup diminué si l’on se contentait de ce qui paraissait suffisant à nos pères. Une ou deux chandelles des six ou des huit et la pétoche de résine dans la cuisine, tel était l’éclairage auquel on a substitué les lustres, les candélabres, les lampes, le gaz dans les escaliers, les corridors, l’office, la cuisine. Tout cela est très beau, très brillant, très commode ; mais ce n’est pas le renchérissement de la vie. On fait de la nuit le jour et du jour la nuit. On ne profite pas de la lumière gratuite du soleil, et on se plaint du renchérissement !
Le chauffage à égalité de calorique utilisé est devenu plus économique qu’autrefois où dans d’immenses âtres on brûlait des charretées de bois sans se chauffer. Les appartements mieux clos, capitonnés, conservent la chaleur que des appareils perfectionnés concentrent. On peut avec ces appareils utiliser la houille et le coke dont l’usage était nul dans les maisons particulières. Mais ici encore au lieu de chauffer une seule pièce où se réunissait toute la famille, il faut trois ou quatre foyers à la fois. Tout cela se paye et doit se payer.
Que de choses il y aurait à dire sur le luxe des réceptions, mais il faut abréger.
Autrefois on voyageait peu, il fallait absolument avoir affaire pour quitter son logis, et deux diligences à 15 places suffisaient chaque jour pour les communications entre Paris et les grandes villes telles que Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, etc. Aujourd’hui il semble que chacun se sente piqué de la tarentule. Bains de mer, villes d’eaux, excursions à l’étranger, sont devenus pour une grande partie de la population aussi bien en province qu’à Paris une nécessité impérieuse. Ceux-là même que leurs affaires ou la modicité de leur budget empêchent d’entreprendre de longs voyages s’en dédommagent les dimanches et jours de fête dans les campagnes des environs. Chaque grande ville a une banlieue très étendue, et de leur côté les villageois vont faire des parties de plaisirs dans les villes. Le bon marché des transports a créé des nécessités de locomotion inconnues à nos pères ; c’est comme le bon marché des ports de lettres et des dépêches télégraphiques qui a créé des besoins de correspondances qui n’existaient pas autrefois.
On ne niera pas que chaque port de lettre ne coûte bien moins qu’il y a 50 ans et pourtant quel est celui de nous qui ne dépense en lettres ou dépêches infiniment plus que ne dépensaient nos pères à qui même les dépêches télégraphiques étaient interdites par un monopole jaloux.
Combien encore de jouissances gratuites dont nous ne sentons pas le prix parce que nous y sommes habitués et qui contribuent puissamment aux facilités de la vie ! Je me bornerai à en énumérer quelques-unes : éclairage public, eaux abondantes, propreté des rues, égouts, promenades, fêtes toutes plus brillantes les unes que les autres, dont la multiplicité épuise le génie inventif des édiles et de leurs collaborateurs. On paye tout cela, dira-t-on, par les octrois, sans doute et c’est là ce qui explique que certains produits tels que les boissons, la viande, le beurre, les volailles, etc., ne soient pas meilleur marché. Si encore il ne fallait pas que ces impôts payassent la rançon de nos malheurs !
Je n’hésite pas à affirmer, et j’espère n’être pas contredit sur ce point, qu’une famille qui aujourd’hui s’appliquerait à vivre comme on vivait il y a 50 ans dépenserait beaucoup moins qu’on ne dépensait alors tout en jouissant gratuitement de bien des choses inconnues ou inaccessibles aux modestes fortunes ; et que d’un autre côté une famille si riche qu’elle fût qui aurait voulu vivre de la vie d’aujourd’hui se serait heurtée à des impossibilités matérielles tout en dépensant des sommes énormes pour approcher le plus possible de la vie actuelle.
Concluons donc que ce n’est pas la vie qui est devenue plus chère ; mais les exigences de la vie qui se sont considérablement accrues, et que pour tempérer ces exigences il faut que chacun puise le remède dans sa propre sagesse et sa modération.
Je vous demande pardon, Messieurs, d’avoir si longtemps occupé votre attention ; mais bien que je n’aie pu dans cette conversation qu’effleurer le sujet, il m’a semblé qu’il était nécessaire de combattre un préjugé trop généralement répandu, qui sert de fondement à des attaques injustes contre la science économique dont nous sommes tous les zélés collaborateurs.
Le remarquable exposé de M. Marchal alimente la conversation jusqu’à la fin de la soirée ; elle donne lieu à des observations présentées par MM. Jacques Siegfried, Joseph Garnier, Léon Biellay, Mercier, Marchal, Dr Frère.
M. Jacques Siegfried adresse à M. Marchal quelques objections. Il fait remarquer surtout que les jouissances prétendues gratuites, dont M. Marchal a parlé, nous coûtent en réalité très cher, et que l’honorable orateur, en énumérant nos principales dépenses, en a omis une qui n’est cependant pas insignifiante : c’est l’impôt que nous payons à l’État, augmenté de celui que nous payons au département et à la ville, et qui pour chacun des habitants de Paris représente un assez joli chiffre. Et c’est là une des dépenses auxquelles nul ne peut se soustraire. En effet, beaucoup de dépenses que M. Marchal considère comme facultatives : dépenses de logement, de vêtements, de déplacements, etc., sont parfaitement obligatoires, par cette simple raison qu’on ne peut vivre parmi les hommes civilisés comme on vivrait chez les Zoulous et les Pieds Noirs. M. Siegfried, entrant dans les détails, fait ensuite entrer en ligne de compte l’infériorité des produits. Il cite notamment le linge qui a aujourd’hui une bien moins grande durée que dans le passé.
M. Joseph Garnier est frappé des faits rapportés par M. Marchal, et de la démonstration qui en résulte.
Il pense avec lui que le renchérissement de la vie doit surtout être attribué aux mœurs, c’est-à-dire au développement des besoins et à leur satisfaction. Si nous vivions comme nos pères, nous ne dépenserions guère plus qu’eux.
Une autre observation, c’est que dans ces appréciations il faut tenir compte de la dépréciation des métaux monétaires.
Au sujet de la remarque de M. Siegfried sur la moindre qualité des produits, il dit qu’il faut tenir compte du service qu’on lui demande. Le linge, par exemple, est aujourd’hui plus fin, lavé plus souvent, plus empesé, plus porté que dans le passé ; il est tout naturel qu’il dure moins que les chemises de nos grands-pères.
M. Léon Biollay, inspecteur des perceptions municipales à Paris, fait remarquer que ceux qui semblent se soucier le moins du renchérissement des denrées alimentaires, ce sont les ouvriers, qui ne sont point soumis précisément aux obligations sociales qui pèsent sur les bourgeois, et consacrent à se bien nourrir et à s’abreuver largement la presque totalité de leurs salaires. Les vraies victimes du renchérissement, ce sont les petits employés, les petits rentiers, toute cette classe bigarrée qui appartient à la bourgeoisie par son éducation, qui doit vivre ou paraître vivre de la vie des classes aisées.
M. Mercier, publiciste, estime que la « Haussmannisation » de Paris, que beaucoup de villes grandes et moyennes ont imitée, est bien pour quelque chose dans l’élévation générale du prix de la vie.
Cette observation est confirmée par M. le Dr Frère, membre du Conseil municipal de Paris.
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