En 1875, pour parer au mal causé par le phylloxera, l’administration centrale et locale ont édicté des mesures liberticides, en faisant usage de pouvoirs qui sortent de leurs attributions. Pour Michel Chevalier, la proscription du cépage américain, et l’emploi forcé de certains produits chimiques, sont hautement condamnables. C’est d’ailleurs une règle générale, rappelle-t-il, que « l’autorité, dans l’intérêt du public et dans celui de sa propre considération, est tenu de se montrer extrêmement réservée en présence des problèmes qui viennent à être posés dans la sphère des arts utiles, agriculture, manufacture, commerce. Il convient qu’elle tourne sa langue sept fois avant de se prononcer pour une des solutions qui ont pu être proposées. Elle doit favoriser la diversité des tentatives plutôt que de les restreindre. »
Michel Chevalier, « L’administration et le phylloxera », Journal des économistes, juillet 1875.
L’ADMINISTRATION ET LE PHYLLOXERA
I.
Ce qui se passe présentement au sujet du phylloxera et des moyens de conjurer ce fléau porte en soi un enseignement dont l’administration devra faire son profit. Elle est rappelée ainsi à l’observation d’une des règles le plus recommandées par l’économie politique, à savoir que l’autorité, dans l’intérêt du public et dans celui de sa propre considération, est tenu de se montrer extrêmement réservée en présence des problèmes qui viennent à être posés dans la sphère des arts utiles, agriculture, manufacture, commerce. Il convient qu’elle tourne sa langue sept fois avant de se prononcer pour une des solutions qui ont pu être proposées. Elle doit favoriser la diversité des tentatives plutôt que de les restreindre.
Sous une autre forme, on peut dire que la liberté du travail est un principe que l’administration ne viole pas impunément sans dommage pour le public qui travaille et qui consomme, et sans porter atteinte au respect dont il est nécessaire qu’elle-même soit entourée.
On sait combien, depuis la fin de l’hiver et le retour de la chaleur, les prédictions des optimistes au sujet du phylloxera ont été démenties par l’événement. Le fléau s’est révélé dans cent localités qu’on croyait exemptes. Il a fait des bonds impétueux qui l’ont transporté loin des endroits où l’on se plaisait à croire qu’il était cantonné. Ces vignobles, qu’on se flattait d’avoir sauvés, sont visiblement menacés de la destruction.
On se rappelle aussi à quels incidents l’invasion du phylloxera a donné naissance depuis dix-huit mois environ. On s’aperçut alors, un peu tard, que le mal était grave. Les départements attaqués s’étaient renfermés jusque-là dans une résignation passive. Ils semblaient attendre que la Providence fît pour eux un miracle, comme si elle en faisait pour d’autres que ceux qui s’aident eux-mêmes. Seul, le département de l’Hérault avait montré de la prévoyance et déployé de l’activité, quoique le fléau n’eût pas encore envahi son territoire. Il avait provoqué une souscription entre les départements déjà maltraités et ceux qui étaient seulement menacés, pour former, à frais communs, une récompense considérable qui excitât le zèle des savants et des inventeurs. Par un vote de son Conseil général, il s’était inscrit en tête de la liste pour une somme importante. Son appel aux autres départements resta à peu près sans écho. Dans la Gironde, le Conseil général, saisi d’une proposition analogue par le duc Decazes, qui en est membre, avait refusé son concours, quoique le département fût déjà atteint. C’est à peine si un ou deux Conseils généraux se déclarèrent prêts à s’associer à celui de l’Hérault. Si notre mémoire nous sert bien, celui du Gers donna cette preuve de sagesse. Le Vaucluse, qui avait été dévasté, garda le silence. Le Gard, où le désastre se développait et qui compte tant d’agriculteurs distingués, se croisa les bras.
Ce fut alors que, dans l’Hérault, on songea au procédé curatif qui consiste à recourir à un certain nombre de cépages américains, signalés comme indestructibles par le phylloxera. On sait que l’insecte exerce sa furie sur les racines de l’arbuste et non pas ailleurs. Eh bien, se dit-on, les plants américains fourniront les racines sur lesquelles nous grefferons les cépages français, en supposant que le vin produit par les raisins américains laisse à désirer ou ne soit pas égal en qualité au vin donné par nos vignes. Le ministre de l’agriculture d’alors, M. de la Bouillerie, envoya en Amérique, sur la recommandation des députés de l’Hérault, un savant distingué, M. Planchon, pour étudier les cépages américains dans leurs rapports avec le phylloxera. La somme strictement indispensable aux frais de cette mission qui devait être si utile, somme que le ministre, malgré sa bonne volonté, n’avait pu trouver tout entière dans son budget restreint, fut complétée par la Société d’agriculture de l’Hérault, qui unissait loyalement ses efforts intelligents à ceux du Conseil général.
Après le voyage de M. Planchon, à la suite des communications que, dès son retour, il fit à l’Institut (Académie des sciences) et du rapport qu’il adressa au ministre de l’agriculture, il fut clair qu’il y avait beaucoup d’espérances à fonder sur l’intervention des cépages américains, en les employant soit pour former les racines de l’arbuste, soit même pour produire le vin, dans le cas des qualités communes. Il était probable que, de cette manière, on sauverait une récolte qui occupe une si grande place dans notre richesse agricole et qui contribue pour une si forte part à alimenter le Trésor public.
Ce procédé n’était pas exclusif des méthodes curatives proprement dites, c’est-à-dire de l’emploi des substances chimiques qui, infusées dans le sol, y détruiraient l’insecte. Il n’excluait pas non plus l’expédient très simple, appliqué avec succès sur son domaine par un habile agriculteur, M. Faucon, expédient qui n’est malheureusement qu’à l’usage d’un très petit nombre de propriétaires, mais dont l’efficacité est certaine. C’est de tenir la vigne complètement submergée pendant plusieurs mois de l’hiver. Le phylloxera, longtemps plongé dans l’eau, périt par asphyxie.
En même temps que se formait dans l’Hérault une opinion publique favorable aux cépages américains, l’esprit chercheur et progressif par lequel se recommande ce département se livrait à des expériences de différentes sortes. Les uns, croyant qu’en fortifiant la vigne par un redoublement d’engrais, on lui permettrait de résister à la dévastation, agirent en conséquence. D’autres, sachant qu’il existe des réactifs chimiques propres à détruire les insectes par les vapeurs ou les gaz qu’ils dégagent, essayèrent quelques-unes de ces substances et en particulier le sulfure de carbone, qui possède en ce genre une grande énergie et qu’on peut fabriquer à bas prix. Plus récemment, après qu’on eut reconnu l’impuissance du sulfure de carbone, non pour tuer l’insecte, mais pour atteindre les myriades de sujets disséminés dans le sol, on s’est retourné vers les sulfo-carbonates alcalins. Un savant illustre, président de la commission spéciale formée dans le sein de l’Académie des sciences pour s’occuper du phylloxera, avait constaté, dans des expériences de cabinet, l’action foudroyante de ce réactif sur l’insecte cause de tant de maux, et il en avait recommandé l’essai dans des termes que la crédulité publique a singulièrement exagérés.
À cette occasion, les ressources qu’offre la chimie avaient séduit un certain nombre de personnes qui s’étaient empressées de crier victoire avant que le combat eût été livré. D’autre part, le bruit s’était répandu, non sans fondement, que si le phylloxera s’était introduit en France, c’était à la suite et par l’effet de l’importation de quelques cépages américains dans la culture de la Gironde et dans celle du Vaucluse. Il n’en fallut pas davantage pour que l’administration centrale à Paris, assourdie par les clameurs prématurées des enthousiastes de la chimie, se prononçât dans le sens des chimistes. Elle crut d’ores et déjà que telle ou telle drogue, et spécialement le sulfo-carbonate de potassium, fourniraient le remède.
II.
Là-dessus, le ministre de l’agriculture, oubliant le proverbe que souvent, si la parole est d’argent, le silence est d’or, a adressé une circulaire en l’honneur des sulfo-carbonates alcalins aux sociétés d’agriculture, comices agricoles, etc. C’était au commencement du mois de mai dernier. Puis le Journal Officiel a publié une note complémentaire portant que « le gouvernement enverrait sur place des délégués de l’académie des sciences pour constater le mal et appliquer le remède ». Le ministre a fait cependant une distinction opportune entre « les pays entièrement infestés » et les « taches nouvelles ». À l’égard des premiers il avait « dû s’en remettre à l’initiative individuelle des viticulteurs », et il se bornait à leur recommander les sulfo-carbonates ; mais quant aux « taches nouvelles », il en assume la responsabilité. L’administration, disait l’Officiel, « ne peut que traiter toute tache nouvelle avant qu’elle devienne un foyer d’infection, dans tous les cas où la présence de l’insecte aura été constatée à 40 ou 50 kilomètres des localités généralement envahies ». Le trait le plus regrettable dans la circulaire officielle, c’est que le ministre, dans l’ardeur de son zèle, voulait imposer aux propriétaires des terrains où se trouveraient les « taches », la méthode curative pour laquelle il était passionné. Bon gré, mal gré, les vignes y seraient traitées selon la méthode chère au ministre. C’est en vertu de la loi sur l’échenillage que le ministre entendait s’introduire d’autorité chez les propriétaires, manipuler leurs vignes, bouleverser leurs champs et y répandre la drogue dont le mérite est problématique. Que le ministre consulte l’avocat de son ministère : on lui dira s’il n’y a rien de commun entre l’échenillage et les mesures à prendre contre le phylloxera. L’échenillage est une opération simple, qu’on pratique tout entière au-dessus du sol, qui va rapidement, et entraîne fort peu de frais, et l’effet en est certain. Le procédé que le ministre veut qu’on applique à la vigne est très dispendieux, il suppose qu’on fouille le sol profondément. Si quelques expériences ont paru en indiquer l’efficacité, il en est d’autres où il a complètement échoué. Et même, il y a lieu de craindre que dans certains cas il ne tue le malade qu’on a tant à cœur de guérir.
Une année environ avant la circulaire ministérielle et la note de l’Officiel, les administrations locales, c’est-à-dire les préfets, s’étaient mis en campagne.
À ce moment, on ne parlait pas encore des sulfo-carbonates alcalins ; mais il y avait des propriétaires qui avaient entendu dire que le phylloxera venait d’Amérique. Ils étaient allés trouver les préfets pour les exciter contre les cépages américains et même contre tous cépages étrangers par surcroît de précaution. Les préfets, surtout les nouveaux, aiment assez à lancer la foudre. Ce rôle de Jupiter flatte leur amour-propre. Et puis ils se souviennent de ce mot du grand Napoléon, que le préfet, tel qu’il l’avait fait, était un empereur au petit pied. Dans plusieurs départements donc les préfets, par vanité, ou pour contenter des administrés affolés de terreur, ont fulminé des arrêtés contre les vignes étrangères au département. Ces arrêtés sont des monuments d’irréflexion. Les préfets qui en sont les auteurs n’ont pas pris la peine d’examiner si les cépages américains arrivés il y a douze ou quinze ans dans le Vaucluse et dans la Gironde n’étaient pas des plants enracinés, au lieu d’être comme ce qu’on importe aujourd’hui de simples sarments. La différence est grande : un plant enraciné peut apporter l’insecte dans le chevelu de ses racines. Un sarment, baguette de bois lisse, ne le peut pas. Les préfets auraient pu aussi s’enquérir de ce qui était advenu de ces plants américains, s’ils étaient morts ou s’ils étaient restés plein de vie : ils auraient appris que les cépages américains plantés chez M. Laliman, de Bordeaux, et dans le village de Roquemaure (Vaucluse) étaient florissants, tandis qu’autour tout était mort, ce qui était une raison non pour interdire leurs similaires, mais bien pour les propager dans les régions déjà envahies ou immanquablement destinées à l’être.
Il y a donc eu cinq ou six arrêtés préfectoraux (les préfets expérimentés se sont abstenus), destinés à empêcher l’entrée dans divers départements des cépages américains. Le ton de ces arrêtés est impératif et absolu. MM. les préfets qui se sont portés à ces actes tranchent à tort et à travers ; ils ordonnent ce qu’ils n’ont pas le droit d’ordonner ; ils édictent des mesures impraticables. Ils ne se contentent pas de décréter la proscription « contre les cépages américains », ils interdisent l’entrée de tout cépage. Non seulement ils ne veulent pas qu’on plante du neuf dans leur département ; ils prohibent même le transit. Ils seraient bien embarrassés de dire quelle sanction pénale ont leurs arrêtés, de quel droit ils s’immiscent ainsi dans la pratique d’une culture qui est une des plus étendues de la France, et où ils prennent le droit qu’ils s’arrogent d’entraver la liberté de l’agriculture. Ils n’ont pas vu que, pour donner effet à leurs arrêtés, il leur faudrait établir sur toutes les routes des postes de douaniers, arrêter et visiter les voitures des voyageurs, les charrettes d’exploitation. Ils n’ont pas compris que, spécialement dans les départements méridionaux, où la vigne est partout, et forme un ensemble continu, il était chimérique de supposer qu’on arrêterait le fléau au moyen de restrictions sur le transport des sarments. Ils ont oublié que les ailes dont l’insecte est pourvu à un certain moment de son existence, lui permettent de se transporter à plusieurs kilomètres d’une seule volée. Ce qui est plus grave, ils ont fait comme s’ils ignoraient que l’introduction des cépages américains était un des procédés les plus recommandés pour combattre le mal. À ce point de vue, tous ces arrêtés étaient sous diverses formes l’histoire de l’ours et de l’amateur des jardins. Le quadrupède du fabuliste tue l’homme son ami, sous prétexte de le garantir d’un ennui. Les arrêtés préfectoraux, sous prétexte de mettre fin à un fléau, interdisent aux propriétaires le moyen le plus efficace, et probablement le seul efficace qu’il y ait, pour l’arrêter. Il serait à désirer que l’administration centrale, et c’est un point que nous prenons la liberté de recommander au ministre de l’Intérieur, homme fort éclairé, annulât les arrêtés des préfets. En pareil cas le gouvernement intelligent ne doit pas hésiter à désavouer ses agents. D’ailleurs le nombre des préfets qui se sont trompés ou laissé abuser est fort limité.
Le ministre de l’agriculture, il est vrai, s’est trompé aussi, ou tout au moins, il s’est trop pressé de recommander un mode de traitement dont la valeur était et reste fort douteuse. Mais il ne s’est pas trompé de la même manière que les cinq ou six préfets fautifs. Et puis qui est-ce qui est infaillible ? Et enfin l’intérêt commande que les arrêtés préfectoraux en question soient cassés ; car ils font obstacle aux efforts des agriculteurs pour combattre le fléau. D’ailleurs si l’autorité supérieure ne s’empressait de casser les arrêtés malencontreux, l’affaire serait déférée aux tribunaux qui, très probablement, déclareraient qu’aucune loi n’interdit ni ne punit ce que les préfets ont voulu empêcher, outre qu’ils l’ont voulu en contrevenant à l’intérêt public. Du reste, si l’on veut absolument ménager l’amour-propre des préfets, il y a un moyen simple ; c’est que le ministre de l’agriculture retire en même temps sa circulaire qui est un acte très hasardé, il en faut convenir. Que la circulaire ministérielle et les arrêtés préfectoraux soient sacrifiés ensemble sur l’autel de la patrie !
III.
Il doit tarder à un homme de sens comme le ministre de l’agriculture et du commerce de sortir de la fausse situation où il s’est placé. Il a pu lire dans les journaux une réfutation de sa circulaire et de sa note à l’Officiel, qui, par la force des choses, est désobligeante au fond, quoique l’agriculteur de qui elle vient n’ait rien négligé pour la rendre acceptable dans la forme. Cet agriculteur est un ancien membre du Corps législatif, que la révolution du 4 septembre trouva procureur général à Pau et qu’elle destitua. C’est M. Fabre, propriétaire de la terre de Saint-Clément, à quelques kilomètres de Montpellier. M. Fabre oppose aux espérances conçues par le ministre une série de faits qui les anéantissent. Le ministre croit qu’en guettant attentivement les taches, en avant des terrains dont le phylloxera est visiblement le maître, et en les soumettant à un traitement chimique, le fatal insecte sera arrêté dans ses débordements. Pas du tout, lui écrit M. Fabre ; quand on aperçoit une tache, c’est que le phylloxera est là depuis quelque temps et qu’il occupe sous terre, non quelques mètres carrés, mais une grande surface. Faire disparaître complètement les taches et les terrains infectés qui y tiennent serait un travail d’Hercule et un travail sans fin.
Ce travail même serait-ce une opération pratique, commercialement parlant, c’est-à-dire qu’un propriétaire puisse raisonnablement entreprendre ? Aboutirait-il à un résultat ? La lettre de M. Fabre nous paraît établir qu’à la première question on a lieu de répondre par la négative, et que, dans l’état actuel des choses, il n’y a pas non plus de réponse positive à la seconde.
Le sulfo-carbonate de potassium coûte cher, et il en faut beaucoup. De plus, il est indispensable, pour le faire pénétrer dans le sol, de le dissoudre dans beaucoup d’eau, et l’eau n’abonde pas dans les terrains plantés de vignes. Un des délégués de l’Académie des sciences, M. Mouillefort, avait déjà signalé cette difficulté ; mais M. Fabre dit que la grande quantité d’eau reconnue nécessaire par le savant chimiste serait encore insuffisante, qu’il en faudrait cinq fois davantage. Or, quelle dépense ne serait-ce pas d’apporter sur les vignes 2 000 hectolitres par hectare, ou seulement la moitié, le quart ?
Du moins le succès est-il au bout de l’opération ? À cela M. Fabre répond : « Employés à faibles doses, les sulfo-carbonates donneront des résultats incomplets ; si, au contraire, on augmente la quantité, non seulement la dépense augmentera outre mesure, mais la vigne succombera. Les expériences vont être faites et ne tarderont pas à démontrer la justesse de mes prévisions. » À la suite de ces considérations, M. Fabre expose les motifs tirés de la pratique des autres et de la sienne, qui lui font croire que le salut de la vigne viendra d’un judicieux emploi des cépages américains. Nous n’avons pas à le suivre sur ce terrain, parce que nous n’entendons pas nous ériger en professeur d’agriculture.
Nous ne voulons pas franchir les limites de l’économie politique. Nous recommandons l’observation d’un principe que cette science indique pour la bonne gestion des affaires publiques. Nous avons le regret de remarquer que l’administration supérieure, représentée par le ministre de l’agriculture et du commerce, et l’administration locale représentée par les préfets, se sont fourvoyées à l’envi l’une de l’autre dans cette affaire du phylloxera. Elles se sont mises dans ce cas fâcheux pour avoir cédé sans réflexion à l’impulsion d’un zèle louable au fond, mais très peu éclairé, et à des sollicitations peu intelligentes. Quelles que soient les circonstances atténuantes, elles ne se sont pas moins abusées d’une manière exemplaire. Elles ont barré le chemin au progrès. Elles se sont méprises sur les bornes de leurs attributions, en se supposant des pouvoirs qu’elles n’ont pas et ne peuvent avoir, une compétence qui ne leur appartient pas. Ni les ministres, ni les préfets ne sont les arbitres des arts utiles. Ils n’ont pas qualité pour leur prescrire leurs opérations, ni pour leur interdire telle ou telle manière de procéder, à moins que ce ne soit expressément inscrit dans la loi. L’industrie est libre et le travail est affranchi. Tenter de les courber sous le joug des règlements administratifs, c’est, il faut le dire, un contre-sens, une tentative rétrograde, une usurpation et une atteinte à l’intérêt public. Il n’y a pas de bon sentiment qui pût excuser des entreprises pareilles, si l’on y persistait, après avoir reçu des avertissements tels que ceux qui, dans l’affaire du phylloxera, les événements eux-mêmes donnent à l’administration.
MICHEL CHEVALIER.
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