Paul Janet (1823-1899), brillant élève de Victor Cousin, fut également son secrétaire en 1845-1846 avant d’enseigner la philosophie morale. « La Liberté de penser » est un article paru en 1866 dans la Revue des Deux Mondes. L’auteur rend compte d’un ouvrage d’Emile Beaussire, De la liberté intellectuelle et morale, paru la même année.
Beaussire est l’un des fondateurs, avec Émile Boutmy, de l’École libre des sciences politiques en 1871, l’ancêtre de l’Institut d’études politiques de Paris, dit familièrement Sciences Po. Janet y donna lui-même une série de cours.
Dans cette recension, l’auteur se propose d’exposer les principes du droit naturel touchant la liberté de penser et d’examiner les objections qu’elle peut soulever.
La liberté de penser ou d’écrire, dit Janet, a pour fondement ce principe de Descartes : « Ne reconnaître pour vrai que ce qui paraîtra évidemment être tel. » Puisque c’est un devoir pour l’esprit de ne se soumettre qu’à l’évidence, il faut que ce soit en même temps un droit ; car comment pourrions-nous obéir au devoir, si on nous refuse le droit ? Il découle de ceci que l’État n’est pas juge du vrai et du faux, et qu’il est seulement garant des droits de chacun. La liberté de penser n’est donc susceptible de répression qu’en tant qu’elle porte atteinte aux droits des individus.
On prétend que Paul Janet ne serait pas un philosophe original. C’est peut-être vrai mais c’est tout à son honneur. Il appartient à la catégorie des grands pédagogues de la philosophie. Comme son maître Victor Cousin, c’est un génie de la synthèse, de l’exposé clair et rigoureux, du style limpide et sans fioritures. On regrette de ne pas trouver d’équivalent au XXe siècle, comme si la capacité à penser dans un langage clair s’était perdue dans les brumes de la nouveauté, de l’originalité à tout prix.
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