Chaque jour de match de cette coupe du monde 2014, retrouvez un article consacré à des aspects intellectuels d’un pays en lice ce jour-là. À suivre dans les jours prochains : « Le Chili, terrain d’essai de la liberté des banques », « Richard Cobden, le maître anglais de Bastiat », « L’influence de Turgot aux Pays-Bas » , ou « La diffusion de l’œuvre de Ludwig von Mises en Corée du Sud ». Aujourd’hui, avant le choc entre l’Allemagne et le Portugal, présentation, en quelques citations choisies, du grand libéral que fut Wilhelm Röpke.
De nombreux articles ont été écrits en langue française sur l’ordo-libéralisme de Wilhelm Röpke, et ce n’est pas ce dont il sera question précisément ici. Plutôt que de présenter l’ordo-libéralisme de ce penseur allemand, nous préférons présenter son libéralisme, dans un sens plus étendu. Car bien qu’il fut un libéral original, Röpke n’en fut pas moins un libéral, s’inscrivant dans la lignée des économistes Autrichiens tels que Ludwig von Mises.
C’est ce que la petite série de citations suivantes va illustrer :
« La conviction que le véritable pouvoir créatif ne peut s’épanouir que dans la liberté, et non dans le silence mortuaire de la police de la pensée ; que, sans l’intelligence individuelle la société et l’Etat doivent finir par dépérir ; que l’homme possède un droit à la protection contre le pouvoir arbitraire et l’abus du pouvoir ; que l’écrasement de toute divergence d’opinion et de toute indépendance d’esprit doit conduire finalement à l’ennui dans lequel la vie intellectuelle nationale en vient à être étouffée, où manque la joie du rire, tout signe d’humour, et même l’éclat de la vie, et où rien ne se développe à part la ferveur brutale du fanatisme ? cette conviction, et rien d’autre, constitue cet individualisme libéral si calomnié et si incompris. La plupart des anti-libéraux considèrent cette conviction comme l’expression d’un vulgaire matérialisme. » (Wilhelm Röpke, “End of an Era”, 1933, in Against the Tide, p.8)
« Nos anti-capitalistes souvent si insensés tireraient le plus grand bien de prendre attentivement connaissance de la volumineuse littérature économique, qui démontre que, dans la pratique, le socialisme ne peut que s’effondrer à cause de l’impossibilité du calcul économique dans une société socialiste. » (W.R., “The Intellectuals and Capitalism”, 1931, in Against the Tide, p.28)
« Les aides obligatoires de l’Etat-providence paralysent la volonté des individus de prendre en charge leurs propres besoins et son poids financier affaiblit considérablement leur capacité à le faire. Dans le même temps, cette limitation de la prévoyance individuelle rend les individus de plus en plus dépendants de l’aide publique obligatoire et accroit leur demande de telles aides. » (W.R., “Robbing Peter to Pay Paul : On the Nature of the Welfare State, 1958, in Against the Tide, p.210)
« Malgré son nom séduisant, l’Etat-providence se développe et s’effondre par la contrainte. C’est la contrainte qui est placée sur nous, et le pouvoir, par l’Etat, de punir ceux qui ne s’y conforment pas. Une fois que cette contrainte apparaît clairement, il est tout aussi clair que l’Etat-providence est un mal aussi grand que l’est chaque restriction de liberté. » (Ibid., p.212)
« L’économie en tant que science tire ses origines de la critique rationnelle des pratiques gouvernementales naïvement non-scientifiques du mercantilisme. » (W.R., “End of an Era”, p.91)
« L’anarchie politique mène irrémédiablement au chaos. Mais l’anarchie en économie, étrangement, produit un résultat opposé : un univers ordonné. Notre système économique est peut-être anarchique, mais il n’est pas chaotique. On ne peut pas s’attendre à ce que celui qui ne considère pas que cela est un phénomène magnifique, et qui mérite par conséquent l’étude la plus patiente, puisse montrer un grand intérêt aux questions économiques. » (W.R., Economics of the Free Society, Chicago, Henry Regnery, 1963, p.4
« Le processus économique capitaliste peut être comparé à un plébiscite ininterrompu dans lequel chaque pièce de monnaie représente une voix et dans lequel les consommateurs, par leur consommation, votent constamment afin de décider quels types de biens doivent être produits, et en quelle quantité. » (Ibid., p.197)
« Il est impossible de trop insister sur le fait qu’en ce qui concerne la tâche de gérer la vie économique, nous faisons face à un choix exclusif entre l’économie de marché et l’économie dirigée. Nous ne pouvons chercher refuge dans une troisième voie, dans les coopératives ou dans les syndicats, ou dans tout autre « sous-équivalent » du socialisme. Nous devons choisir entre le commandement des prix ou le commandement de l’Etat, entre le marché et les autorités, entre la liberté économique et la bureaucratie. […] Celui qui fait le choix de l’économie de marché doit aussi faire le choix de la libre formation des prix, la concurrence, le risque de perte et de gain, la responsabilité individuelle, la libre entreprise et la propriété privée. » (W.R., Economics of the Free Society, p.254)
Benoît Malbranque