Le scepticisme face à la vaccination dans le Journal des économistes

En juillet 1885, un jeune enfant recevait treize injections de moelles rabiques de moins en moins atténuées et devenait le premier être humain vacciné — Louis Pasteur venait de vaincre la rage. Le procédé même de la vaccination ne paraissait toutefois pas convaincant à tous. En septembre de la même année, le Journal des économistes rapportait expériences et discussions récentes et faisait part de doutes sur l’utilité de la vaccination contre différentes maladies contagieuses. L’auteur concluait même son article par un avertissement destiné à ceux qui voudraient que les populations se fassent inoculer « à tout propos et pour toutes les maladies, depuis la fièvre jaune jusqu’au rhume de cerveau, sans se demander un instant quelle sorte de macédoine tous les virus plus ou moins atténués peuvent produire sur l’organisme. »

Charles Comte, Traité de législation (4 volumes)

Frédéric Bastiat, dont on n’est plus exactement à prouver la clairvoyance et la sagacité, et qui peut passer pour un bon juge en matière de libéralisme, vouait un véritable culte à Charles Comte, et disait de son Traité de législation que s’il se trouvait relégué sur une île déserte, en n’ayant que le choix d’un seul livre, c’est celui-là qu’il emporterait, car « c’est celui qui fait le plus penser ». — Avec une grande finesse d’analyse et en s’appuyant sur une littérature de voyage qu’il dominait parfaitement, Comte fait parcourir les siècles et les continents à son lecteur, à la recherche des fondements mêmes des lois et des conditions dans lesquelles une société est la plus à même de se développer et de garantir le bonheur et l’aisance matérielle de ses membres. Avec sa plume libre et soignée, l’auteur l’emmène sur les îles reculés du Pacifique, chez les peuplades indiennes de l’Amérique, ou dans les déserts de Syrie et d’Égypte, pour montrer ce que devient l’homme sous les différents niveaux de civilisation et les gouvernements plus ou moins libres ou tyranniques.

La faible connaissance du Tableau économique de Quesnay par les physiocrates

Dans cette lettre, restée longtemps inédite, et dont un très large extrait a désormais été publié par l’Institut Coppet, le marquis de Mirabeau revient sur la réalité de l’engagement intellectuel de ses collègues physiocrates. De ses propres yeux, dit-il, il a vu que le Tableau économique de Quesnay restait totalement ignoré par la majorité des soi-disant disciples. La plupart menaient en fait leur propre chemin, prenaient à des sources variées, et composaient une œuvre en somme très hétéroclite.

Laissons Faire, n°40, décembre 2021

Au programme de ce nouveau numéro : Diversité et tolérance chez Montaigne, par B. Malbranque. Discours sur le droit de guerre et de paix, par Volney (1790) — L’éducation doit-elle être libre, par Charles Renouard (1828) — Sur le prix des enterrements et l’alternative de la mort à bon marché, par Gustave de Molinari (1851). Recension : Condorcet, Écrits sur les États-Unis, édités par Guillaume Ansart, Classiques Garnier, 2021, 192 pages.

L’avenir des femmes

Dans cette lettre anonyme, communiquée au Journal des économistes en 1876, une lectrice exprime ses sentiments sur le rôle social assumé par les femmes, sur l’éducation qui leur est prodiguée, et sur les droits qui leur restent à conquérir.

Les réformes économiques de Turgot et les causes de la Révolution (partie 1 sur 2)

En 1877, les économistes libéraux de l’Académie retracent de manière critique le passage de Turgot au Contrôle général des Finances, ministère dont on fête alors le centenaire, et qui vient d’être éclairé par un grand ouvrage de Pierre Foncin. Pour certains, comme Fustel de Coulanges, Turgot a une grande part de responsabilité dans l’échec de ses réformes, et il ne faudrait pas voir de la sagesse dans un homme qui tente volontairement l’impossible. D’autres font valoir les oppositions et les mérites intrinsèques du ministre, qui reste grand au milieu de l’adversité.

La première brochure politique de Frédéric Bastiat (1830)

En 1830, Frédéric Bastiat communique publiquement son soutien en faveur de M. Faurie, candidat aux élections législatives dans les Landes. Dans ce qui est sa première publication, il soutient déjà l’idéal libéral qui sera le but de sa carrière économique et politique. — « Sommes-nous libres, demande-t-il par exemple, si le gouvernement épie tous nos mouvements pour les taxer, soumet toutes les actions aux recherches des employés, entrave toutes les entreprises, enchaîne toutes les facultés, s’interpose entre tous les échanges pour gêner les uns, empêcher les autres et les rançonner presque tous ? »

Le reboisement et la trufficulture

Sujet inlassablement traité par les économistes libéraux du XIXe siècle, la déforestation de la France fait très tôt l’objet de mesures législatives et de règlements d’autorité. Dans cet article du Journal des économistes de juin 1875, Joseph Clément rend compte d’une méthode inusitée et pourtant profitable de reboiser la France sans recourir à l’autorité, mais par la seule force de l’intérêt personnel des propriétaires : il s’agit de planter des chênes truffiers, dont la rentabilité est rapide et sûre.

Les États-Unis tels qu’ils sont

Témoin, comme Gustave de Molinari, de l’Exposition universelle de Philadelphie en 1876, Charles Limousin fournit ses impressions de voyage au Journal des économistes. À l’américanophilie du début du siècle a succédé, chez lui comme chez bien d’autres, une certaine retenue, et une appréciation plus critique ou réaliste de l’expérience américaine.

Essai sur les garanties individuelles que réclame l’état actuel de la société (1818)

Texte d'une puissance rare, et sorte de testament intellectuel, l'Essai sur les garanties individuelles que réclame l’état actuel de la société (1818) de Pierre Claude François Daunou présente une défense raisonnée et complète des principes qui fondent le libéralisme, tant dans ses aspects économiques, que politiques et même sociaux. Classique encore trop peu lu, il est aujourd'hui disponible dans une réédition de l'Institut Coppet.

Table des articles de la 3e série du Journal des économistes (1866-1877)

L'Institut Coppet poursuit la mise au net de la table complète des articles de cette publication classique dans l'histoire du libéralisme français qu'est le Journal des économistes (1841-1940), avec l'ajout du contenu de la 3e série, couvrant les années de 1866 à 1877. Celle-ci vient s'ajouter aux deux séries déjà présentes sur notre site dans la zone bibliographie. — Cet outil, une fois complet, permettra de retrouver les articles consacrés à chaque thématique dans cette grande revue de référence.

Le travail des femmes au XIXe siècle, par Paul Leroy-Beaulieu (1873)

En 1870, le libéralisme français fait encore un accueil mitigé aux théories féministes qui, depuis plusieurs décennies déjà, se développent et s’affirment. Cette année-là, un concours de l’Académie des sciences morales et politiques récompense un mémoire du jeune Paul Leroy-Beaulieu, dont la sensibilité généreuse se mêle à une rigueur théorique digne d’éloge, et qui réconcilie la tradition de pensée du libéralisme français avec les revendications des droits des femmes. Dans son étude sur le travail des femmes, il étudie l’ouvrière dans ses métiers de prédilection, examine sa condition et les causes de son abaissement moral et économique. Pour elle, il demande de la reconnaissance, mais surtout des garanties plus grandes pour sa liberté.

De la protection des richesses naturelles (1869)

Dans cet article du Journal des économistes, Clémence Royer examine si l’épuisement possible des ressources naturelles par l’industrie privée n’est pas une raison de s’écarter, en cela, de la règle générale du laissez faire, laissez passer, adoptée par les économistes. Elle trace, de la disponibilité du charbon ou du pétrole américain nouvellement découvert, un tableau qui l’incite à demander une intervention publique à des fins de protection.

Quels moyens de subsistance ont les femmes

En 1862, le Journal des économistes ouvre ses pages à Mlle Julie-Victoire Daubié, féministe, première bachelière de l’histoire (1861), et auteur d’un mémoire sur l’amélioration du sort des femmes. Dans ce texte, elle appelle à une prise de conscience sur le sort économique des femmes, concurrencées dans leurs métiers traditionnels par la grande industrie et le recours à des ouvriers mâles ; elle réclame pour les femmes une égale liberté et davantage de considération. « Quand la vie est devenue un combat, écrit-elle, les arbitres ne peuvent sans iniquité jeter inégalement des armes dans la lice, pour que la femme pauvre, considérée comme la balayure d’une rue qu’on veut assainir, se trouve partout écrasée sous le char de la civilisation. »

Le choléra asiatique et la question des quarantaines, par Arthur Mangin

En décembre 1866 se clôt une seconde année marquée par le choléra, qui meurtrit l’Europe et auquel on lutte par des vexations, des restrictions aux transports et des quarantaines. « Comme pour se railler des vaines barrières qu’on prétendait lui opposer, écrit alors Arthur Mangin dans le Journal des économistes, c’est précisément dans les pays où les mesures les plus rigoureuses avaient été prises qu’il a sévi le plus cruellement. » Lui plaide pour une enquête scientifique sérieuse sur les causes de l’épidémie et ses moyens de transmission, car les gouvernements ont trop voulu postuler qu’ils savent ce qu’en vérité ils ignorent.

Laissons Faire, n°39, novembre 2021

Au programme de ce nouveau numéro : Les inspirations libérales d’Émile Zola dans Germinal, par Benoît Malbranque. — Les bienfaits de la concurrence en matière de religion, par Henri Basnage de Beauval (1684). — Changements opérés dans le climat par les défrichements, par Volney (1803). — Recension : Christian Cheminade, Noblesse commerçante contre noblesse militaire. Une querelle des Lumières (1756-1759), éditions Classiques Garnier, septembre 2021, 372 pages.

De la noblesse de la peau, etc., par l’abbé Grégoire (1826)

Dans cette petite brochure publiée en 1826, l’abbé Grégoire fait valoir contre les préjugés établissant dans certains esprits une « noblesse de la peau », pour les blancs et contre les noirs et sang-mêlés, la petitesse de cette conception, sa stupidité orgueilleuse. Il plaide pour une réforme des lois et des mœurs, qui ouvre à toutes les couleurs une vie civile libre.

Socialisme, par Ludwig von Mises

Dans cet ouvrage majeur, publié pour la première fois en 1919, Ludwig von Mises instruit le procès du socialisme d’après les principes de l’école autrichienne. Sa réfutation logique, reposant sur des arguments tant anciens que nouveaux, lui valut sa notoriété, et fut un jalon important dans l’histoire de la pensée. Dans l’immédiat, cependant, l’ouvrage ne parvint pas à enrayer la montée en puissance des totalitarismes inspirés par le socialisme, au cours du XXe siècle.

La Religieuse de Diderot, avec une introduction sur la portée libérale de ce roman

Abandonnée contre son gré dans un couvent, la jeune et naïve Suzanne Simonin fait face aux forces abrutissantes de la coercition et entame une marche difficile pour sa libération. Diderot la conduit sous nos yeux de sa résignation première et de l’échec de sa bonne volonté, à l’énervement progressif de ses sens et de sa tête, et jusqu’à la rébellion et plus tard à l’évasion qui doit lui rouvrir les portes du monde libre. Il dresse ainsi, avec ce roman, un formidable plaidoyer en faveur de la liberté.