Jour 17 de l’anthologie des 30 textes de Robert Wenzel qui vous amènera à devenir un libertarien bien informé : cet article est extrait des Economic Controversies, chapitre 21, “The Fallacy of the “Public Sector”” (2011). Il a été originellement publié dans la New Individualist Review (été 1961) : 3-7.
L’Institut Coppet vous propose pour cette rentrée, en partenariat avec Contrepoints, l’anthologie des trente textes libertariens de Robert Wenzel traduite en français. Robert Wenzel est un économiste américain éditeur du site Economic Policy Journal et connu pour son adhésion aux thèses autrichiennes en économie. Cette anthologie regroupe une trentaine de textes qui s’inscrivent quasi-exclusivement dans le courant autrichien et plus généralement dans la pensée libertarienne. Le but principal de cet ensemble bibliographique de très grande qualité est de former au raisonnement libertarien, notamment économique, toute personne qui souhaiterait en découvrir plus sur cette pensée.
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Résumé : Le secteur public est souvent considéré comme ayant des propriétés particulières qui le distinguent du secteur privé et qui le rendent indispensable. L’analyse de Murray Rothbard vise à démontrer l’inutilité totale du secteur public, et donc de l’État dans son ensemble, afin de favoriser une approche privée de l’ensemble des fonctions qui sont actuellement du ressort du secteur public.
Par Murray N. Rothbard
Traduit par Marc Lassort, Institut Coppet
Murray N. Rothbard (1926-1995) fut le doyen de l’école autrichienne, fondateur du libertarianisme moderne, et directeur académique du Mises Institute. Il fut également éditeur avec Lew Rockwell du Rothbard-Rockwell Report, et avait nommé Lew Rockwell comme son exécuteur testamentaire.
Nous avons entendu beaucoup de choses au cours des dernières années au sujet du « secteur public », et les discussions solennelles abondent à travers le pays sur l’opportunité ou non d’un accroissement du secteur public vis-à-vis du « secteur privé ». La terminologie elle-même est parfumée de science pure, et surgit en effet du soi-disant monde scientifique – en fait plutôt malpropre – des « statistiques nationales du revenu ». Mais le concept est à peine wertfrei [1] ; en fait, il se heurte à de graves implications contestables.
En premier lieu, nous pouvons nous demander : « secteur public » de quoi ? De ce qu’on appelle le « produit national ». Mais notez les hypothèses cachées : que le produit national est quelque chose comme une tarte composée de plusieurs « secteurs », et que ces secteurs, aussi bien publics que privés, sont ajoutés pour rendre le produit de l’économie dans son ensemble. De cette façon, l’hypothèse est introduite clandestinement dans l’analyse : les secteurs public et privé sont tout aussi productifs, tout aussi importants, sur un pied d’égalité, et « nos » décisions sur les proportions de secteur public dans le secteur privé sont à peu près aussi anodines que les décisions de n’importe quel individu à propos du fait de manger du gâteau ou de la crème glacée. L’État est considéré comme une sympathique agence de service, assez semblable à l’épicier du coin, ou plutôt au voisinage de quartier, dans laquelle « nous » nous réunissons pour décider du degré d’implication de « notre État » dans nos choix et nos vies. Même les économistes néoclassiques qui tendent à favoriser le libre marché et la société libre considèrent souvent l’État comme un organe de service social généralement inefficace, mais aimable, qui enregistre mécaniquement « nos » valeurs et décisions.
On aurait pu penser qu’il n’est pas difficile pour les chercheurs et les profanes de comprendre le fait que l’État n’est pas comme les Rotariens ou les Élans, qu’il diffère profondément de tous les autres organes et institutions de la société, à savoir qu’il vit et qu’il acquiert ses revenus par la contrainte et non par un paiement volontaire. Le regretté Joseph Schumpeter n’a jamais été plus astucieux que quand il a écrit : « La théorie qui assimile les impôts à des cotisations de cercles ou à l’achat des services, par exemple, d’un médecin, prouve seulement combien cette branche des sciences sociales reste encore étrangère à l’application des méthodes scientifiques. » [2]
Mis à part le secteur public, qu’est-ce qui constitue la productivité du « secteur privé » de l’économie ? La productivité du secteur privé ne vient pas du fait que les gens se précipitent pour faire « quelque chose », n’importe quoi, avec leurs ressources. Elle consiste dans le fait qu’ils utilisent ces ressources pour satisfaire les besoins et les désirs des consommateurs. Les hommes d’affaires et les autres producteurs orientent leurs énergies, sur le marché libre, à la production des produits qui seront les mieux récompensés par les consommateurs. La vente de ces produits peut donc « mesurer » à peu près l’importance que les consommateurs leur accordent. Si des millions de personnes utilisent toute leur énergie à la production de calèches, ils ne seront pas en mesure de les vendre, et donc la productivité de leur production sera quasi nulle. D’autre part, si quelques millions de dollars par an sont dépensés sur le produit X, alors les statisticiens peuvent juger que ces millions constituent le rendement productif de la partie X du « secteur privé » de l’économie.
Une des caractéristiques les plus importantes de nos ressources économiques est leur rareté : les facteurs de la terre, du travail et des biens d’équipement sont tous rares, et peuvent tous être mis à disposition des diverses utilisations possibles. Le marché libre les utilise « productivement » parce que les producteurs sont incités à produire sur le marché ce dont les consommateurs ont le plus besoin : des automobiles, par exemple, plutôt que des calèches. Par conséquent, alors que les statistiques de la production totale du secteur privé semblent être une addition de chiffres ou un comptage des unités de production, les mesures de la production impliquent réellement la décision qualitative importante qu’est la considération comme « produit » de ce que les consommateurs sont prêts à acheter. Un million de voitures, vendues sur le marché, sont productives, car les consommateurs les ont considérées comme telles. Un million de calèches, invendues, ne seraient pas des « produits » car les consommateurs les auraient ignorées.
Supposons maintenant que l’État décide d’entrer dans cette idylle de libre-échange. L’État, pour des raisons qui lui sont propres, décide de bannir totalement les automobiles (peut-être parce que les ailes des voitures heurtent la sensibilité esthétique des dirigeants) et oblige plutôt les constructeurs automobiles à produire l’équivalent en calèches. Sous un tel régime strict, les consommateurs seraient en un sens obligés à acheter des calèches car aucune voiture ne serait permise. Dans ce cas, toutefois, le statisticien serait certainement myope s’il enregistrait les calèches sans broncher, comme étant tout aussi « productives » que les voitures précédentes. Ce serait se moquer du monde que de les considérer comme également productives. En fait, compte tenu des conditions plausibles, le total du « produit national » pourrait ne même pas faire apparaître une baisse statistique, alors qu’il aurait en fait diminué de manière drastique.
Et pourtant, le « secteur public » grandement vanté est dans une situation bien pire que les calèches de notre exemple hypothétique. Car la plupart des ressources digérées par l’estomac de l’État n’ont même pas été vues, et encore moins utilisées, par les consommateurs, qui avaient au moins le droit de conduire leur calèche. Dans le secteur privé, la productivité d’une entreprise se mesure par le montant que les consommateurs sont prêts à payer pour ses produits. Mais dans le secteur public, la « productivité » de l’État est mesurée – mirabile dictum – par combien il dépense ! Au début de la construction des statistiques de produit national, les statisticiens ont été confrontés au fait que les activités de l’État, au contraire des activités des individus et des entreprises, ne pouvaient pas être évaluées par les paiements volontaires du public – car de tels paiements volontaires sont rares voire inexistants. En supposant, sans aucune preuve, que l’État doive être aussi productif que tout autre chose, les statisticiens se sont donc reposés sur ses dépenses comme un gage de sa productivité. Ainsi, les dépenses publiques sont non seulement aussi utiles que les dépenses privées, mais tout ce que l’État a besoin de faire pour accroître sa « productivité » est d’élargir l’étendue de sa bureaucratie. Embaucher plus de fonctionnaires, et voir la productivité du secteur public augmenter ! C’est une forme facile et joyeuse de magie sociale pour nos citoyens perplexes.
La vérité est exactement l’inverse des hypothèses communes. Loin d’ajouter confortablement au secteur privé, le secteur public ne peut se nourrir que du secteur privé : il vit nécessairement de manière parasitaire sur l’économie privée. Mais cela signifie que les ressources productives de la société, loin de satisfaire les désirs des consommateurs, sont maintenant éloignées par la contrainte de ces désirs et besoins. Les consommateurs sont délibérément contrariés, et les ressources de l’économie sont détournées des consommateurs au profit des activités désirées par la bureaucratie parasitaire et les politiciens. Dans de nombreux cas, les consommateurs privés n’obtiennent rien du tout, en dehors peut-être de la propagande diffusée pour eux à leurs propres frais. Dans d’autres cas, les consommateurs reçoivent quelque chose de très éloigné de leur liste de priorités – comme les calèches par exemple. Dans les deux cas, cela devient évident que le « secteur public » est en fait anti-productif, qu’il soustrait plutôt qu’il ajoute au secteur privé de l’économie. Car le secteur public vit par des attaques continues contre le critère même qui est utilisé pour mesurer la productivité : les achats volontaires des consommateurs.
Nous pouvons mesurer l’impact fiscal de l’État sur le secteur privé en soustrayant les dépenses publiques du produit national. Car les paiements de l’État de sa propre bureaucratie ne sont guère des ajouts à la production, et l’absorption publique des ressources économiques les sortent de la sphère productive. Cet indicateur est bien sûr seulement fiscal : il ne mesure pas l’impact anti-productif des diverses réglementations étatiques, qui paralysent la production et l’échange par d’autres moyens que les ressources absorbées. Il n’exclut pas non plus les nombreux autres sophismes à propos des statistiques sur le produit national. Mais au moins, il supprime ces mythes communs comme l’idée que le rendement productif de l’économie américaine a augmenté au cours de la Seconde Guerre mondiale. En soustrayant le déficit public au lieu de l’ajouter, nous constatons que la productivité réelle de l’économie a diminué, comme on pouvait raisonnablement s’y attendre au cours d’une guerre.
Dans un autre de ses commentaires avisés, Joseph Schumpeter a écrit à propos des intellectuels anticapitalistes : « le capitalisme doit soutenir son procès devant des juges qui ont déjà en poche la sentence de mort. Ces juges se préparent à la prononcer, quels que soient les arguments invoqués par les avocats, le seul succès que puisse enregistrer une défense irréfutable consistant à faire modifier l’acte d’accusation. » L’acte d’accusation est certainement en train de changer. Dans les années 1930, nous avons appris que l’État devait s’étendre car le capitalisme avait provoqué la pauvreté de masse. Maintenant, sous l’égide de John Kenneth Galbraith, nous entendons que le capitalisme a péché car les masses sont trop riches. Là où autrefois la pauvreté était subie par « un tiers d’une nation », nous devons maintenant déplorer la « famine » du secteur public.
Par quelles normes le Dr Galbraith conclut-il que le secteur privé est trop lourd et le secteur public trop anémique, et donc que l’État doit faire preuve d’une contrainte accrue pour rectifier sa propre malnutrition ? Certes, son niveau n’est pas historique. En 1902, par exemple, le produit national net des États-Unis était de 22,1 milliards de dollars. Les dépenses publiques (fédérales, étatiques, et locales) totalisaient 1,66 milliards de dollars, soit 7,1 % du produit total. En revanche, en 1957, le produit national net était de 402,6 milliards de dollars, et les dépenses publiques totalisaient 125,5 milliards de dollars, soit 31,2 % du produit total. La déprédation budgétaire de l’État a donc été multipliée par quatre ou cinq à travers le siècle actuel. Ce n’est guère plus la « famine » du secteur public. Et pourtant, Galbraith affirme que le secteur public a de plus en plus faim, par rapport à son statut dans le pauvre XIXe siècle.
Quelles sont donc les normes que Galbraith veut nous faire découvrir lorsque le secteur public va enfin être à son optimum ? La réponse n’est rien que le caprice personnel :
Il y aura une question de savoir quel est le critère de l’équilibre – à quel moment peut-on conclure que l’équilibre a été atteint dans la satisfaction des besoins privés et publics. La réponse est qu’aucun test ne peut être appliqué, car il n’en existe pas… Le déséquilibre actuel est clair… Cela étant, la direction vers laquelle nous allons pour corriger les sujets est tout à fait claire. [3]
Pour Galbraith, le déséquilibre d’aujourd’hui est « clair ». Pourquoi clair ? Parce qu’il regarde autour de lui et voit les conditions déplorables chaque fois qu’opère l’État. Les écoles sont surpeuplées, le trafic urbain est congestionné et les rues jonchées, les rivières sont polluées. Il aurait pu ajouter que la criminalité est de plus en plus effrénée et les cours de justice bouchées. Tous ces éléments sont des zones de fonctionnement et de propriété étatiques. La seule solution supposée à ces défauts flagrants est de siphonner plus d’argent dans les caisses de l’État.
Mais comment se fait-il que les organismes étatiques réclament davantage d’argent et dénoncent les citoyens pour leur réticence à fournir plus ? Pourquoi n’avons-nous jamais les équivalents d’entreprises privées pour les embouteillages (qui se produisent dans les rues étatiques), les écoles mal gérées, les pénuries d’eau, et ainsi de suite ? La raison est que les entreprises privées acquièrent l’argent qu’ils méritent par deux sources : le paiement volontaire pour des services par les consommateurs, et l’investissement volontaire par les investisseurs dans l’attente de la demande des consommateurs. S’il y a une demande accrue pour un bien détenu privativement, les consommateurs paient davantage pour le produit, et les investisseurs investissent davantage dans son offre, et donc « nettoient le marché » à la satisfaction de tous. S’il y a une demande accrue pour un bien détenu par l’État (eau, rues, métro, etc.), on parle toujours de nuisance à la consommation pour le gaspillage de ressources précieuses, couplé à la nuisance pour le contribuable qui doit rechigner à une charge fiscale plus élevée. L’entreprise privée fait de cela son affaire pour envoyer le consommateur au tribunal et pour satisfaire ses demandes les plus urgentes, les agences étatiques dénoncent le consommateur comme utilisateur gênant de leurs ressources. Seul un État, par exemple, regarderait avec tendresse la prohibition des voitures privées comme une « solution » au problème des rues congestionnées. De nombreux services étatiques « gratuits », d’ailleurs, créent une demande excédentaire permanente sur l’offre, et donc une « pénurie » permanente du produit. L’État, en bref, acquérant son revenu par la confiscation forcée plutôt que l’investissement volontaire et la consommation, n’est pas et ne peut pas être dirigé comme une entreprise. Ses inefficacités inhérentes les plus flagrantes, l’impossibilité pour lui de nettoyer le marché, l’assureront d’être un nid à problèmes sur la scène économique. [4]
Dans les temps anciens, la mauvaise gestion inhérente de l’État était généralement considérée comme un bon argument pour garder autant de choses que possible hors des mains de l’État. Après tout, quand on a investi dans une proposition perdante, on essaie de réfréner son entrée dans une mauvaise affaire. Et pourtant, le Dr Galbraith voudrait nous faire redoubler de détermination à verser de l’argent durement gagné par le contribuable au trou à rats du « secteur public », et utilise même les défauts de fonctionnement de l’État comme son argument majeur !
Le Professeur Galbraith a deux flèches à son arc. Tout d’abord, il affirme que comme le niveau de vie de la population a augmenté, les biens ajoutés ne valent pas autant que les précédents. C’est une connaissance assez basique. Mais Galbraith déduit en quelque sorte de ce déclin que les désirs privés des gens n’ont maintenant plus aucune valeur pour eux. Mais si c’est le cas, alors pourquoi les « services » étatiques, qui se sont développés à un rythme beaucoup plus rapide, devraient toujours avoir autant de valeur pour exiger un nouveau transfert de ressources vers le secteur public ? Son dernier argument est que les désirs privés sont tous artificiellement induits par la publicité commerciale, qui « crée » automatiquement les désirs qu’elle sert supposément. En bref, les gens, selon Galbraith, s’ils étaient laissés seuls, se contenteraient vraisemblablement d’un niveau de vie de subsistance, assez pauvre. La publicité est le méchant qui gâche cette idylle primitive.
Mis à part le problème philosophique de la manière dont A peut « créer » les désirs et les souhaits de B sans que B puisse placer son sceau d’approbation sur eux, nous sommes confrontés ici à une vision curieuse de l’économie. Est-ce que tout ce qui est au-dessus de la subsistance est « artificiel » ? Selon quel critère ? Par ailleurs, pourquoi une entreprise, dans le monde, devrait-elle passer par des frais et une peine supplémentaire en induisant des changements dans les désirs des consommateurs, quand elle peut faire du profit en servant les désirs existants et « incréés » des consommateurs ? La « révolution du marketing » à laquelle est soumis le monde des affaires, sa concentration accrue et presque frénétique d’ « études de marché », démontrent l’inverse du point de vue de Galbraith. Car si, par la publicité, la production des entreprises crée sa propre demande des consommateurs, il n’y aurait nul besoin d’études de marché – et aucune inquiétude à propos des faillites non plus. En fait, le consommateur dans une société d’opulence étant loin d’être plus qu’un « esclave » de la société commerciale, la vérité est précisément le contraire : pour que le niveau de vie s’élève au-delà de la subsistance, le consommateur devient de plus en plus difficile et exigeant sur ce qu’il achète. L’homme d’affaires doit payer encore plus le tribunal pour le consommateur qu’il ne l’a fait avant : d’où les tentatives furieuses des études de marché de savoir ce que les consommateurs veulent acheter.
Il y a un domaine de notre société, cependant, où les critiques de Galbraith sur la publicité peuvent presque s’appliquer – mais c’est dans une zone qu’il n’a curieusement jamais mentionnée. C’est l’énorme quantité de publicité de propagande par l’État. C’est la publicité qui diffuse au citoyen les vertus d’un produit que, contrairement à la publicité d’une entreprise, il n’a jamais eu la chance de tester. Si la compagnie de céréales X imprime une photo d’une jolie fille qui déclame que « les céréales X sont délicieuses », le consommateur, même si un nombre suffisant de personnes prennent cela au sérieux, a une chance de tester personnellement cette proposition. Bientôt son propre goût déterminera s’il va acheter ou non. Mais si une agence étatique fait de la publicité pour ses propres vertus dans les médias de masse, le citoyen n’a aucun test direct qui lui permette d’accepter ou de rejeter ces affirmations. Si des besoins sont artificiels, c’est bien ceux qui sont générés par la propagande étatique. En outre, la publicité de l’entreprise est au moins payée par les investisseurs, et son succès dépend de l’acceptation volontaire du produit par les consommateurs. La publicité étatique est payée par les moyens des impôts extraits aux citoyens, et peut donc continuer année après année, sans contrôle. Le citoyen infortuné est cajolé en applaudissant les mérites de ceux-là mêmes qui, par la coercition, sont forcés à le payer pour la propagande. Il s’agit véritablement de rajouter l’insulte au préjudice.
Si le Professeur Galbraith et ses partisans sont de pauvres guides pour la gestion du secteur public, quelle norme nous offre notre analyse à la place ? La réponse est la norme jeffersonienne ancienne : « Le meilleur gouvernement est celui qui gouverne le moins. » Toute réduction du secteur public, tout déplacement des activités du secteur public vers la sphère privée est un gain économique et moral net.
La plupart des économistes ont deux arguments fondamentaux en faveur du secteur public, que nous pouvons seulement examiner très brièvement ici. Le premier est le problème des « avantages externes ». A et B gagnent souvent, dit-on, s’ils peuvent forcer C à faire quelque chose. Beaucoup peut être dit dans la critique de cette doctrine, mais il suffit de dire ici que tout argument proclamant la bonté et le droit de trois voisins, par exemple, qui aspirent à former un quatuor à cordes, à forcer un quatrième voisin avec une baïonnette à apprendre à jouer de l’alto, est à peine digne d’un commentaire sobre. Le second argument est plus substantiel. Dépouillé de jargon technique, il précise que quelques services essentiels ne peuvent tout simplement pas être fournis par la sphère privée, et donc que l’offre étatique de ces services est nécessaire. Et pourtant, chacun des services fournis par l’État a été fourni avec succès dans le passé par l’entreprise privée. L’affirmation fade que les citoyens privés ne peuvent peut-être pas fournir ces biens n’est jamais confortée, dans les travaux de ces économistes, par aucune preuve quelle qu’elle soit. Comment se fait-il, par exemple, que les économistes, en tenant souvent compte de solutions pragmatiques et utilitaires, ne demandent pas « d’expérimentations » sociales dans cette direction ? Pourquoi les expériences politiques doivent-elles toujours être en direction de davantage d’État ? Pourquoi ne pas donner le marché libre à un comté ou même à un État ou deux, et voir ce qu’il peut accomplir ?
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