Opinion d’Ernest Martineau sur l’établissement d’une zone franche au port de La Rochelle-La Pallice (Le Courrier de La Rochelle, 19 mars 1905).
Monsieur le directeur,
Vous avez bien voulu me demander mon opinion sur l’utilité de la création d’un port franc à La Pallice.
Un port franc, comme son nom l’indique, est une zone dans laquelle les marchandises peuvent être introduites et manipulées avec une pleine et entière liberté, affranchies, en vue de l’exportation, de toutes taxes protectrices de renchérissement.
C’est à M. Charles-Roux, alors député de Marseille, que revient l’honneur de l’initiative des ports francs dans le rapport fait par lui sur le budget de 1897.
Dans ce projet primitif, le gouvernement était autorisé à créer des ports francs, sans restriction aucune, partout où les communes et les Chambres de commerce en feraient la demande.
Grâce à la commission protectionniste de la Chambre des députés, ce projet primitif a été tellement déformé, il a subi tant de restrictions que, non seulement quatre ou cinq seulement de nos ports de commerce, parmi lesquels ne figure pas La Pallice, pourraient obtenir la franchise, mais que, si la Chambre des députés adopte les conclusions de sa commission des douanes, il ne restera des zones franches que le nom.
Il en sera de la franchise de ces zones comme de la liberté dont parle Figaro, liberté de tout faire, excepté ceci, cela, avec tant d’exceptions finalement qu’on ne pourra plus rien faire du tout.
Je m’explique donc comment des hommes prudents et avisés se réservent, avant de prendre parti sur la question, pour le port de La Pallice, de connaître la solution que donnera le Parlement au projet de sa commission protectionniste.
La seule objection qui puisse être faite à cette réserve est que, faute de démarches actuelles, il serait trop tard ensuite pour réclamer un port franc pour La Pallice, au cas où la Chambre des députés amenderait dans un sens plus libéral le projet de sa commission.
Il n’est pas douteux, à mon avis, qu’une zone franche à La Pallice, une véritable zone franche comme à Hambourg, à Copenhague, serait pour notre grand port le point de départ d’un développement considérable de son importance commerciale.
Cela est d’une évidence telle que, comme les axiomes, il n’est nul besoin d’en faire la démonstration.
Les statistiques, pour Hambourg et les autres zones franches, pourront d’ailleurs éclairer tous ceux qui voudront bien ne pas fermer les yeux à la lumière.
Cette question, pour être traitée complètement, mérite des développements qui dépassent les limites d’une simple lettre, et je me propose de l’examiner prochainement dans une conférence à l’Oratoire.
Veuillez agréer, etc.
E. MARTINEAU,
Président de l’Association philotechnique.
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