[Moniteur du 10 janvier 1851.]
Rapport fait par M. Gustave de Beaumont, au nom de la commission chargée d’examiner le projet de loi tendant à autoriser le Président de la République à ratifier la convention d’extradition conclue entre la France et l’Espagne, et signée à Madrid le 26 août 1850.
Messieurs, une convention nouvelle d’extradition conclue entre la France et l’Espagne, et signée à Madrid le 26 août dernier, vous est soumise par le gouvernement, en exécution de l’art. 53 de la constitution ainsi conçu :
« Il (le Président de la République) négocie et ratifie les traités. Aucun traité n’est définitif qu’après avoir été approuvé par l’Assemblée nationale. »
La commission que vous avez nommée pour l’examen de cette convention n’a pas hésité à l’approuver ; et votre approbation ne lui paraît pas devoir être plus douteuse que la sienne. Depuis longtemps, les gouvernements de France et d’Espagne étaient d’accord pour reconnaître la nécessité d’un nouveau traité d’extradition. La convention du 14 octobre 1765, que celle-ci doit remplacer, était surannée ; quelques-unes de ses dispositions n’étaient plus en harmonie avec les mœurs et les institutions des deux peuples. Elle présentait d’ailleurs de graves lacunes. Le traité du 26 août, réalisé après de longues négociations, supprime tout ce qui avait cessé de convenir, et ajoute ce qui était devenu nécessaire. Déjà, dans une séance récente, vous avez sanctionné de vos suffrages un projet de loi relatif à un traité de même nature conclu entre la France et la Saxe. Alors vous avez, par l’organe de la commission chargée d’examiner ce premier projet, donné votre entier assentiment à cet acte du gouvernement, et l’avez félicité de la voie dans laquelle il était entré. En présence d’un acte nouveau, presqu’en tous points pareil au précédent, vous ne pourrez sans doute qu’exprimer la même adhésion.
Les traités d’extradition entre les États répondent à un commun et profond besoin de justice. La morale générale des peuples s’oppose à ce que le criminel d’un pays trouve dans le pays voisin un asile inviolable. Toutes les notions du juste et de l’injuste seraient offensées, si le même forfait, frappé ici d’une peine, demeurait ailleurs sans châtiment ; et si le coupable, chargé du crime le plus infamant, n’avait pour échapper à la loi qu’une ligue de douanes à franchir. Ce besoin d’une justice sinon uniforme, du moins universelle, devient plus impérieux à mesure que, par les progrès de la civilisation, par les développements du commerce et de l’industrie, par l’accroissement et la rapidité des voies de communication, il semble que tous les peuples se rapprochent, s’assimilent, se confondent, et tendent à supprimer toutes les entraves qui les gênent et toutes les barrières qui les séparent. Et, nulle part, ce besoin d’unité dans la justice n’est plus irrésistible qu’entre États qui, comme la France et l’Espagne, se touchent l’un l’autre ; dont les populations limitrophes, quoique géographiquement et politiquement séparées, n’en sont pas moins unies entre elles par d’étroites affinités de race, de mœurs, souvent de langage, quelquefois de famille, et qui, possédant une seule et même connaissance du droit et de l’équité, ne comprendraient pas une justice qui dépendrait d’un fleuve, d’une montagne ou d’une vallée : vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà. Ici répression du crime, là scandale de l’impunité. En exécutant, en développant les traités d’extradition, le gouvernement de la République ne fait donc que suivre le mouvement de la civilisation elle-même, et il est assuré à l’avance de rencontrer dans cette voie l’entier concours de l’Assemblée nationale.
Cependant l’extradition, dont on saisit du même coup d’œil le principle équitable et la nécessité, se pratique suivant de certaines règles : quelles sont ces règles ? Elle se renferme dans de certaines limites : quelles sont ces limites ? Elle s’exécute selon de certaines formes : quelles sont ces formes ? Il a paru à votre commission qu’il lui appartenait de rechercher quelles étaient ces formes, ces règles, ces limites. Il lui a semblé que ce n’était pas assez qu’après avoir lu le traité elle se sentît disposée à en approuver toutes les dispositions ; elle a cru qu’elle devait en constater les motifs, s’en rendre bien compte, et vous les dire. Il s’agit d’une matière qui, sans doute, n’est pas nouvelle, mais dont l’examen, renfermé jusqu’ici dans l’ombre des chancelleries, appartient désormais, dans une certaine mesure, au contrôle public du pouvoir parlementaire. Celte première investigation importe d’autant plus que, si nous sommes bien informés, d’autres traités analogues se préparent en ce moment, et vous seront bientôt déférés. Du reste, en entrant dans cette voie, nous ne faisons que marcher sur les traces de la commission chargée d’examiner le traité d’extradition conclu entre la France et la Saxe. Le rapporteur de cette commission, l’honorable M. de Lagrené, constatait dans son rapport, à la date du 17 juillet dernier, qu’à cette époque la France avait renouvelé des traités d’extradition avec vingt États différents. À ces États, dont il donne la liste, avec la date des traités conclus, il faut ajouter la Saxe. On juge par la mention des pays avec lesquels nous avons déjà des traités d’extradition, de ceux qui ne sont encore liés envers nous par aucune convention de cette nature. Ceux-ci sont notamment : le Danemark, la Suède, la Russie, l’Autriche, le Hanovre le Brunswick, Saxe-Weymar, Francfort, Nassau, le Wurtemberg, les deux Hesses, les États romains, Parme, Modène, etc., etc. On comprend, quand il s’agit d’apprécier un traité accompli, l’intérêt que prête à son examen la perspective des traités analogues qui s’élaborent. Ajoutons que parmi les conventions d’extradition qui sont aujourd’hui en vigueur, quelques-unes, et notamment celle qui lie la France et l’Angleterre, sont, en ce moment, l’objet d’une révision entre les deux gouvernements.
Ce serait d’ailleurs une grande erreur que de croire que l’extradition mutuelle ne se pratique qu’entre États engagés ensemble par une convention écrite et solennelle. L’extradition est commandée par de telles nécessités réciproques de bon ordre et de commune justice, qu’à défaut de traités qui la définissent, elle se règle par l’usage. En fait, la plupart des États que nous avons énumérés plus haut comme n’étant obligés envers nous par aucun traité de ce genre, entretiennent avec la France des rapports d’extradition sinon aussi réguliers, du moins aussi fréquents que les pays avec lesquels nous sommes engagés par une convention formelle. C’est ainsi que les dispositions insérées dans un traité d’extradition n’importent pas seulement au pays qui en est spécialement l’objet, mais touchent encore essentiellement les États qui, en vertu de l’usage seul, pratiquent l’extradition, et, à défaut de traité qui leur soit propre, se régissent par le droit que les conventions d’autrui ont solennellement consacré.
Notre commission s’est donc appliquée à rechercher et à constater très sommairement, et avec la réserve inhérente à un tel sujet, quelques-unes des règles générales auxquelles l’extradition est soumise, et qui ont particulièrement présidé au traité conclu entre la France et l’Espagne. Le concours qu’elle a trouvé dans le département des affaires étrangères et dans le département de la justice, empressés à lui fournir tous les documents désirables, a assez montré à votre commission qu’en s’efforçant d’apporter le tribut qu’elle devait à l’examen de cette intéressante question de droit international, elle n’avait fait que répondre aux désirs et aux vœux du gouvernement.
Si l’on examine avec attention le traité soumis au vote de l’Assemblée nationale, ainsi que les conventions d’extradition conclues depuis dix ou douze années ; si, en même temps, on se rend bien compte des principes qui, en cette matière, dirigent le département des affaires étrangères et celui de la justice, soit dans l’application de ces traités, soit dans nos rapports avec les États que n’oblige aucune convention écrite, on est amené à reconnaître que les règles du sujet, consacrées en France par la théorie et par la pratique, se bornent à un petit nombre, dont les principales sont celles qui suivent :
1° La première de toutes, c’est la réciprocité ; l’obligation de la réciprocité, en tous points, n’a besoin que d’être énoncée pour être admise par tout le monde. Remarquez qu’il ne suffit pas de décréter la réciprocité pour qu’elle existe. La réciprocité pourrait être établie en droit sans se réaliser en fait. C’est ce qui arriverait si, après que deux États en ont posé le principe commun, l’un d’eux apportait volontairement à son exécution des entraves que l’autre n’y mettrait pas. En fait, il résulte des renseignements qui nous ont été donnés par le département des affaires étrangères, que le gouvernement français et les autres gouvernements se demandent et se concèdent à peu près le même nombre d’extraditions. Par exemple, de 1840 à 1850, c’est-à-dire dans un espace de dix ans, la France a concédé 70 extraditions à la Belgique, qui lui en a donné 71. Dans le même laps de temps, elle en accordé 36 à l’Espagne, qui lui en a rendu 29, etc., etc. Ce n’est pas du reste le nombre comparatif des extraditions accordées qui prouve à lui seul la réciprocité. Il faudrait tenir compte aussi du chiffre comparatif de celles qui ont été demandées ; et puis, la réciprocité pourrait exister encore entre deux États se demandant mutuellement le même nombre d’extraditions, et dont l’un en donnerait plus qu’il n’en obtiendrait de l’autre. On conçoit, en effet, qu’animés d’intentions toutes pareilles, deux gouvernements, dont l’un serait armé d’un pouvoir central très fort, et l’autre dépourvu de centralisation, pourraient être, le premier toujours puissant, le second quelquefois inhabile à réaliser les extraditions consenties.
2° C’est une autre règle, non moins absolue que la première, que l’extradition ne peut s’exercer que de gouvernement à gouvernement, c’est-à-dire par la voie diplomatique. L’intérêt général de la justice veut que l’extradition ait lieu ; le respect dû à l’indépendance des nations exige que l’extradition ne puisse s’accomplir que sous l’agrément du pouvoir souverain de chaque État. Les magistrats d’un pays n’ont aucun droit de juridiction sur le territoire d’un autre pays ; et, fussent-ils d’accord pour se livrer réciproquement les malfaiteurs arrêtés sur les frontières respectives, ils n’en auraient pas le droit. En principe, l’extradition est non un acte de justice, mais un acte de police internationale, qui s’accomplit dans un pays en vue de venir en aide à l’exécution de la justice dans un autre pays. Ceci explique pourquoi toutes les demandes ou concessions d’extradition se font par l’intermédiaire du ministre des affaires étrangères. En France, s’agit-il d’une extradition à obtenir de l’étranger, le garde des sceaux en transmet la demande au ministre des affaires étrangères, qui la fait parvenir au gouvernement du pays où se trouve le réfugié. Si c’est de nous que l’extradition est réclamée, la demande en est reçue par M. le ministre des affaires étrangères, qui en saisit aussitôt M. le garde des sceaux ; et, comme il s’agit ici d’un acte qui touche à la souveraineté nationale, on ne se contente pas de l’intervention de deux ministres, dont l’un représente le grand intérêt de la justice, et l’autre l’intérêt non moins grave de nos bons rapports internationaux ; on veut encore une garantie plus haute, celle du chef du pouvoir exécutif. Avant 1848, nulle extradition n’était concédée par le gouvernement français sans une décision signée du roi. Aujourd’hui, tout arrêté d’extradition est soumis à la signature du Président de la République.
3° On vient de voir comment et par qui s’exécute l’extradition. Maintenant, s’il est vrai que l’extradition soit un acte de gouvernement à gouvernement, il ne s’ensuit pas quelle s’accomplisse arbitrairement, discrétionnairement et sans règles. La principale, en cette matière, c’est que le fait pour lequel l’extradition est demandée doit constituer un crime qualifié tel par la loi française. Cette règle est la première limite de l’extradition. Dans l’origine, le principe était de n’accorder l’extradition que pour des faits graves : ce n’était pas là une définition. D’un autre coté, si on s’était borné à dire que l’extradition serait concédée seulement pour des faits qualifiés crimes, par opposition aux délits, le vague eût-il disparu ? Non, car le même fait qui, dans un pays, constitue un crime, n’est ailleurs qu’un simple délit ; et le crime lui-même se distingue ici et là par des caractères différents : tantôt par la gravité de la peine, tantôt par la nature de la juridiction.
Le gouvernement français a pensé que le but auquel on visait serait atteint, si le traité d’extradition prenait le soin d’énumérer tous les cas à raison desquels l’extradition pourrait être réclamée, et ne mentionnait que des faits qui, d’après la loi française, la plus connue de toutes les nations, sont qualifiés crimes, c’est-à-dire sont passibles d’une peine afflictive et infamante. Il a, en conséquence, proposé cette définition aux gouvernements étrangers, qui, en général, l’ont acceptée. C’est ce dont fait foi la plupart des traités. Remarquez que tous les crimes n’y figurent pas ; mais il ne s’y trouve que des crimes. Notez encore qu’en nommant les divers crimes pour lesquels l’extradition sera accordée, les traités n’excluent pas la faculté d’extradition pour les crimes passés sous le silence, et à l’égard desquels les gouvernements ne se sont pas expressément interdit l’extradition. L’art. 2 du traité dit : L’extradition DEVRA être accordée pour les crimes spécifiés, etc. … ; dans ces cas spécifies, l’extradition est due selon les règles du droit des gens ; s’il s’agit de crimes non spécifiés dans le traité, l’extradition, sans être due, peut être consentie moyennant une appréciation subordonnée aux circonstances de chaque cas spécial. Il en est à peu près de même pour les simples délits. En ce qui les concerne, l’extradition n’est jamais due, mais elle n’est pas absolument interdite ; elle demeure facultative comme pour les crimes non spécifiés, avec cette différence, fondée sur l’usage et la raison, qu’à mesure que la qualification légale des faits est moins grave, les circonstances ont besoin de l’être plus pour qu’il y ait lieu à l’extradition. Ainsi et en résumé, pour tous les crimes nommés dans le traité, l’extradition est, en principe, obligatoire ; pour les crimes non mentionnés, elle est facultative ; elle n’est jamais due pour les délits. Le principe même est qu’en matière de délits elle ne se concède pas ; l’usage l’admet seulement dans des cas exceptionnels, dont le gouvernement qui l’accorde est seul juge.
4° De la règle qui précède en découle une autre ; c’est que, pour obtenir l’extradition, il faut produire un mandat de justice, équivalant au moins à un mandat d’arrêt.
La nécessité d’un mandat de justice répond à deux objets essentiels :
Le premier est de constater le titre de la prévention. Le réfugié ne doit être livré qu’en cas de crime, et de certains crimes : il faut bien qu’un acte émané d’une autorité digne de foi constate qu’en effet celui dont l’extradition est demandée a commis ou est inculpé d’avoir commis cette sorte de crimes. Toute autre que l’autorité judiciaire ne pourrait conférer à ces attestations un égal caractère de légalité et d’authenticité. Toute autre d’ailleurs ne présenterait point les mêmes garanties contre l’abus possible des extraditions. Chacun comprend combien il importe que cette grande et sainte loi de droit international, qui préside à la restitution mutuelle des malfaiteurs, ne protège et ne couvre jamais ni des actes de police subalterne, ni des mesures arbitraires, ni de ténébreuses persécutions. Le véritable adversaire de tels abus, c’est le magistrat. Sans doute la justice d’un pays n’enchaîne point le gouvernement d’un autre pays ; mais le pouvoir judiciaire partout, comme la justice elle-même, attire le respect des peuples et des gouvernements ; et le mandat de justice, même décerné par un juge étranger, offre au gouvernement qui concède l’extradition des garanties que ne présenterait point au même degré l’acte émané d’un pouvoir administratif ou d’une autorité municipale.
Mais ce n’est pas assez que le mandat produit à l’appui de la demande d’extradition procède de l’autorité judiciaire ; il faut encore que ce mandat constate, non pas une simple inculpation peut-être légèrement conçue, mais tout au moins un état de prévention très grave, aussi voisin que possible, sinon de la condamnation, du moins de la mise en jugement. C’est pour cela que le mandat exigé pour l’extradition doit être un mandat d’arrêt, qui, comme on sait, ne se décerne que dans des cas graves et suivant des formes solennelles. Les actes judiciaires, tels que l’ordonnance de prise de corps, qui ont en justice une force égale ou supérieure au mandat d’arrêt, à plus forte raison les arrêts de condamnation peuvent sans doute être produits de même à l’appui de la demande. Les mandats d’un ordre inférieur, tels que le mandat de comparution et le mandat d’amener ne le pourraient pas.
5° Un a vu plus haut que l’extradition ne s’accorde que pour de certains crimes ; c’est une autre règle qu’elle ne se concède pas pour crimes politiques. Cette exception, dont il n’est pas besoin d’exposer les motifs, est stipulée dans tous les traités. En l’établissant, les traités ne définissent pas ce qu’il faut entendre par crimes et délits politiques ; et nous croyons qu’ils font bien. La définition serait fort difficile, et l’on a pensé avec raison que chaque cas particulier demandait une appréciation spéciale. Du reste, l’exception relative aux crimes et délits politiques n’est pas seulement écrite dans les traités ; en fait, elle a été invariablement maintenue et pratiquée par le gouvernement de la République, comme elle l’avait été par le gouvernement précédent.
6° Autre exception : les traités d’extradition ne s’appliquent point aux sujets du gouvernement auquel l’extradition est demandée ; en d’autres termes, si un Français, résidant à l’étranger, y commet un crime et rentre en France, le gouvernement du pays où il a commis le crime n’est point en droit de demander son extradition. La raison de cette disposition est simple : comme Français, il est naturellement justiciable de la loi française, même pour les crimes commis à l’étranger. La compétence de la justice française exclut celle de tout juge étranger. Cette réserve pour les nationaux est réciproquement stipulée dans tous les traités.
7° Le privilège de la justice française veut pareillement que, s’agit-il même d’un étranger, si cet étranger est, en France, l’objet d’une poursuite criminelle engagée avant la demande d’extradition, il ne puisse pas être livré avant d’avoir satisfait à la justice française. Si cependant l’étranger n’était engagé en France que dans les liens d’un procès civil, la justice française ne ferait point obstacle à son extradition, et, fût-il détenu pour dettes, il serait extrait de prison et livré, nonobstant les réclamations de ses créanciers, ainsi privés du gage de sa personne. L’intérêt de la vindicte publique domine ici toute considération particulière.
8° Dans tous les cas qui précèdent, on voit demander l’extradition des malfaiteurs qui sont sujets soit de la puissance qui réclame l’extradition, soit de l’État auquel elle est demandée. Comment faut-il procéder quand l’individu dont on veut l’extradition est le sujet d’une puissance tierce ? Par exemple, un Portugais commet un meurtre en Espagne, et se réfugie en France : le gouvernement espagnol demande son extradition au gouvernement français. Que doit faire celui-ci ? Doit-il en référer au gouvernement portugais, c’est-à-dire au gouvernement de celui dont l’extradition est demandée, ou bien, sans se préoccuper des objections que pourrait élever ce gouvernement, doit-il passer outre ? D’après la règle désormais adoptée par la France en cette matière, nous commencerons par prévenir le gouvernement portugais que l’extradition de l’un de ses sujets nous est demandée ; ce gouvernement, ainsi averti, nous adresse les observations qu’il juge convenables et que nous nous réservons d’apprécier. Il convient que la puissance tierce soit mise à même d’élever sa réclamation, mais à la condition que le gouvernement, saisi de la demande d’extradition, en demeure seul souverain juge. Cette solution figure aujourd’hui dans la plupart des traités d’extradition dont elle forme une disposition spéciale.
9° Enfin, et comme dernière règle, en matière d’extradition, tous les États avec lesquels nous avons des traités sont d’accord aujourd’hui pour en exclure les crimes de désertion Les traités spéciaux qui étaient, à cet égard, intervenus sont tombés en désuétude et désormais dépourvus de toute valeur.
Tel est, en résumé, l’esprit et la substance des dispositions principales aujourd’hui consacrées en France sur ce sujet par la théorie et par la pratique. C’est le sens de nos traites écrits et celui de la jurisprudence diplomatique que nous avons admise partout où, à défaut de convention en forme, l’extradition s’exécute par la seule vertu des usages réciproques. Ce sont là les règles générales de nos traités extradition, règles générales qui se modifient sans cesse avec le temps et les mœurs, et qui d’ailleurs ne sont presque jamais uniformément appliquées, par cette raison bien simple que chaque traité d’extradition demande le consentement de deux parties qui ne sont jamais les mêmes. Il ne s’agit pas ici d’une loi que chaque peuple, dans sa souveraineté, fait comme il lui plaît. Chaque traité est un contrat entre deux États indépendants, également souverains ; et il faut avant tout, pour que l’acte commun se réalise, que les deux contractants tombent d’accord, non seulement sur le fond de la convention, mais encore sur une forme qui les satisfasse l’un et l’autre. Or, sans parler des difficultés qui naissent des différences de mœurs, de langue, d’usage et de législation, il suffit, pour que les textes varient quelquefois, que les négociateurs ne soient pas toujours les mêmes, et telle disposition, sujette peut-être à la critique, et que l’on s’étonne de trouver dans un traité, parce qu’on ne la rencontre point dans les autres, est quelquefois celle que, par des motifs plus ou moins plausibles, l’une des parties a stipulée comme condition de son assentiment. La question, dans ce cas, se réduit à savoir si la disposition défectueuse est telle que ses inconvénients surpassent les avantages promis par la convention tout entière. Lors donc qu’on examine un traité de ce genre, il ne s’agit pas de savoir s’il est en tout point semblable à ceux qui précèdent, et s’il contient absolument et textuellement toutes les règles qui viennent d’être exposées, mais bien s’il en consacre les principales, celles qui sont essentielles et qui dominent toutes les autres.
Après s’être ainsi rendu compte des principes généraux qui régissent les conventions d’extradition, votre commission s’est demandé si le respect de ces principes était fidèlement observé dans le traité soumis à votre examen. Il lui a suffi, Messieurs, de lire attentivement le texte de ce traité pour reconnaître que ses articles, bien loin de contredire, consacrent formellement toutes les règles que nous avons signalées connue essentielles en matière d’extradition. Le principe, ses conséquences, ses limites, ses exceptions, le fond et la forme, tout y est. Dans l’art. 1er de la convention, la réciprocité expressément stipulée, et la forme diplomatique seule admise ; dans l’art. 2, la nomenclature des crimes qui donneront lieu à l’extradition ; l’obligation du mandat d’arrêt, prescrite par l’art. 3 ; dans l’art. 6, l’exception relative aux crimes et délits politiques ; l’exception pour les nationaux, également écrite dans l’art. 1er ; dans l’art. 5, la conséquence du droit toujours réservé de la justice nationale déjà saisie, etc. : rien d’essentiel n’est omis. Le traité ne contient point, il est vrai, la disposition souvent insérée dans des conventions analogues, et par laquelle on prévoit la règle de conduite à tenir dans le cas où celui dont l’extradition est demandée serait le sujet d’une puissance tierce ; mais, pour n’être pas écrite dans le traité, la règle n’en existe pas moins, et votre commission s’exagère si peu l’importance de cette observation, qu’elle s’est demandé s’il y avait lieu seulement de la mentionner.
C’est avec le même sentiment d’hésitation et de réserve que votre commission croit devoir signaler quelques expressions de l’art. 2, qui ne s’accordent peut-être pas parfaitement avec les principes que le traité a établis et qu’il a eu certainement l’intention de respecter.
L’art. 2 du traité porte : « Les crimes à raison desquels l’extradition devra être réciproquement accordée, sont :
« 1° L’assassinat, l’empoisonnement, etc. ;
« 2° L’incendie volontaire ;
« 3° La soustraction frauduleuse, si elle a été commise sur une voie publique, ou de nuit et dans une maison habitée, etc. »
Il est évident qu’en énumérant plusieurs faits qualifiés crimes par notre loi pénale, l’art. 2 classe dans cette catégorie la soustraction frauduleuse commise soit de nuit, et dans une maison habitée, soit seulement sur la voie publique. Selon ces termes du traité, la circonstance que le vol aurait été commis sur la voie publique serait aussi aggravante et conférerait au vol le caractère de crime, aussi bien que les deux circonstances réunies de la maison habitée et de la nuit. C’est cependant ce que contredit formellement notre Code pénal, d’après lequel le vol commis de nuit, et dans une maison habitée, est bien un crime ; mais le vol commis sur la voie publique n’est qu’un simple délit. L’erreur est venue sans doute de ce que l’on a confondu deux circonstances de vol qui ont une analogie apparente et qui sont cependant très différentes : le chemin public et la voie publique. Le vol commis sur le chemin public est toujours un crime : le vol commis dans la rue, qui est aussi la voie publique, n’est un crime que s’il tient ce caractère de quelque autre circonstance. Nous croyons, du reste, que c’est ainsi que le département des affaires étrangères et celui de la justice entendent l’art. 2, qui, dans leur pensée, n’a en vue que les vols commis sur les grands chemins. Il nous paraît cependant désirable que dans les dispositions d’actes aussi solennels que les traités d’extradition, il ne se glisse rien d’inexact et d’illogique, même dans la forme. C’est par le même motif que nous nous sommes demandé si le terme délit qui se retrouve dans plusieurs articles du traité, notamment à la fin de l’art. 4 et dans l’art. 7, n’était pas en contradiction avec le texte et l’esprit du traité, qui ne concerne que des crimes. Sans doute, en les prenant dans leur sens général et philosophique, les mots crimes et délits s’emploient indifféremment pour exprimer tous les actes qui offensent la morale et les lois ; mais dans le style légal, le mot crime a un sens technique, et le terme délit a aussi le sien propre ; et s’il est une loi où la signification judiciaire de ces expressions doive être conservée, n’est-ce pas dans celle qui, en réglant les conditions de l’extradition, l’admet pour les faits qualifiés crimes, par opposition aux faits qui ne constituent que des délits ?
L’art. 3 a été aussi, dans le sein de votre commission, l’objet non d’une critique, mais d’une discussion que nous croyons devoir vous soumettre. Cet article, qui consacre la principale garantie contre les abus de l’extradition, est ainsi conçu :
« Les pièces qui devront être produites à l’appui des demandes d’extradition, sont :
« 1° Le mandat d’arrêt décerné contre le prévenu, ou tout autre acte ayant au moins la même force que ce mandat, et indiquant également la nature et la gravité des faits poursuivis, ainsi que la disposition pénale applicable à ces faits…
« 2° Le signalement du prévenu… » etc.
Des voix se sont élevées dans la commission pour mettre en doute si les termes de cet article étaient les meilleurs que l’on pût employer pour consacrer la nécessité d’un mandat de justice à l’appui de la demande d’extradition. Est-il bon de spécifier la nature de ce mandat, en disant que ce sera un mandat d’arrêt ? Le juge français sait ce qu’est le mandat d’arrêt, et en quoi il diffère des autres mandats : les gouvernements étrangers le savent-ils ? Savent-ils ce qui distingue le mandat d’arrêt des mandats d’amener et de dépôt, qui sont aussi des mandats d’arrestation ? Cette connaissance ne leur serait pas nécessaire s’il était convenu, en termes absolus, que l’extradition ne se concéderait que sur la production d’un mandat d’arrêt, à l’exclusion de tous autres. Mais d’après le même article, l’extradition est accordée sur la représentation d’un mandat d’arrêt, ou de tout autre acte ayant au moins la même force que ce mandat. Quels sont les actes ayant la même force que le mandat d’arrêt ? Nous le savons à peu près en France. Nous savons que si, dans l’échelle des moyens d’arrestation, le mandat d’amener et le mandat de dépôt sont au-dessous du mandat d’arrêt, l’ordonnance de prise de corps, l’arrêt de renvoi et le décret de contumace y occupent un rang égal ou supérieur. Mais qu’est-ce qui, à l’étranger, connaît ces nuances qui, en France même, ne sont guère familières qu’aux seuls jurisconsultes ? Ne peut-il pas naître beaucoup de lenteurs, de difficultés même de l’exécution d’un article dont les termes pourront si facilement devenir matière à controverse ? De deux choses l’une, a-t-on dit dans la commission : ou il faudrait qu’en nommant le mandat d’arrêt, le traité nommât également tous les autres actes judiciaires au moyen desquels l’extradition est demandée, ou bien il faudrait éviter de spécifier par son nom technique le mandat de justice reconnu nécessaire, et dire seulement que l’extradition ne pourra se faire que sur un mandat d’arrestation, émané de l’autorité judiciaire, énonçant tout à la fois la nature des faits poursuivis et l’article de la loi pénale qui attribue à ces faits le caractère de crime.
Telles sont les observations qu’a fait naître le texte de l’article 3, au sein de la commission, qui, du reste, n’a pris à ce sujet aucune résolution. Il s’est offert à son esprit quelques doutes. Ce ne sont que des doutes qu’elle exprime, et qu’elle soumet tout à la fois à l’Assemblée et au gouvernement. Non seulement elle ne propose aucun changement à l’article 3 du présent traité, mais encore elle ne voudrait pas que, dans les objections qu’elle a soulevées, le gouvernement vît une opinion arrêtée et l’expression d’un conseil donné en vue de modifications à introduire dans d’autres traités analogues. Le département des affaires étrangères et celui de la justice nous ont donné l’assurance que la définition contenue dans l’art. 3 est très bien comprise à l’étranger, et qu’aucune difficulté ne s’élève sur l’exécution du mandat d’arrêt et des actes judiciaires qui sont destinés à le suppléer. Le nom de mandat d’arrêt, dont le sens naturel est d’accord avec sa signification légale, est accepté partout. En supposant que l’on trouvât une formule meilleure qui, du reste, n’est pas encore indiquée, ne pourrait-il pas y avoir quelque inconvénient à modifier des définitions consacrées par l’usage, par les traités antérieurs, et qui ne sont nulle part mieux comprises qu’en Espagne, dont le gouvernement agit d’ailleurs vis-à-vis du nôtre dans les termes de la plus parfaite réciprocité ? La commission a apprécié ces considérations. M. le ministre des affaires étrangères appréciera aussi celles que nous avons exposées plus haut. Il le fera en tenant compte de tous les faits, dont il est mieux placé que nous pour connaître l’ensemble et la portée.
Nous tenons d’autant plus à ce que le sentiment qui a dicté cette partie du rapport de votre commission ne soit point méconnu, que nous regretterions davantage que l’on pût y voir la moindre restriction aux termes d’approbation que tout d’abord nous avons adressés au traité, et dont, au contraire, nous voulons, en terminant, renouveler l’expression, exempte de toute critique et de toute réserve. L’examen auquel nous nous sommes livrés n’a eu, en somme, d’autre effet que de donner à notre première impression la sanction d’un jugement réfléchi. En discutant cette convention dans son principe et dans ses détails, votre commission a voulu surtout constater l’importance qu’elle attache et que doit attacher l’Assemblée à tout acte qui implique directement ou indirectement la souveraineté de la France, et qui, en satisfaisant aux grands intérêts de la justice chez tous les peuples, doit aussi, et avant tout, sauvegarder l’intérêt suprême de l’indépendance nationale.
Votre commission vous propose, à l’unanimité, l’adoption pure et simple du projet de loi.
PROJET DE LOI.
Article unique. Le Président de la République est autorisé à ratifier, et, s’il y a lieu, à faire exécuter la convention signée, le 26 août 1850, à Madrid, ayant pour objet d’assurer l’extradition réciproque des malfaiteurs entre la France et l’Espagne, et dont une copie authentique demeure annexée à la présente loi.
CONVENTION D’EXTRADITION
Conclue le 26 août 1850 entre la France et l’Espagne.
Le Président de la République française et S. M. la reine d’Espagne ayant reconnu l’insuffisance des dispositions de la convention conclue entre les deux États, le 29 septembre 1765, pour assurer l’extradition réciproque des malfaiteurs, ont résolu, d’un commun accord, de la remplacer par une autre convention plus complète, et, par cela même, plus propre à répondre au but que les hautes parties contractantes s’étaient proposé, et ont muni, à cet effet, de leurs pleins pouvoirs, savoir :
Le Président de la République française : M. Paul-Charles Amable de Bourgoing, commandeur de la Légion d’honneur, grand-croix des ordres de Saint-Michel de Bavière, du Danebrog de Danemark, des Guelphes de Hanovre, de l’ordre de Saxe de la Ligne Ernestine ; commandeur de l’ordre de Léopold de Belgique et de Sainte-Anne de Russie, avec l’épée d’honneur en or, chevalier de l’Épée de Suède, ambassadeur de la République française près de S. M. Catholique ;
Et S. M. la reine d’Espagne : don Pedro-José Pidal, marquis de Pidal, chevalier grand-croix de l’ordre royal et distingué de Charles III, des ordres de Saint-Ferdinand et du mérite des Deux-Siciles, du Lion néerlandais, de Pie IX, de Léopold de Belgique, du Christ de Portugal, des Saints-Maurice-et-Lazare de Sardaigne, de Léopold d’Autriche ; décoré du Nichan Iftikhar de première classe, en diamants, de Turquie ; membre honoraire de l’Académie espagnole, de celle de l’Histoire et de celle de Saint-Ferdinand, et en titre de celle de Saint-Charles de Valence, et premier secrétaire d’État au département des affaires étrangères ;
Lesquels, après s’être communiqué lesdits pleins pouvoirs trouvés en bonne et due forme, ont arrêté les articles suivants :
Art. 1er. Le gouvernement français et le gouvernement espagnol s’engagent, par la présente convention, à se livrer réciproquement (à la seule exception de leurs nationaux) tous les individus réfugiés de France et de ses colonies en Espagne et dans ses provinces d’outre-mer, ou d’Espagne et de ses provinces d’outre-mer en France et dans ses colonies, prévenus ou condamnés comme auteurs ou complices de l’un des crimes énumérés ci-après (art. 2), par les tribunaux de celui des deux pays où le crime aura été commis. Cette extradition aura lieu sur la demande que l’un des deux gouvernements adressera à l’autre par la voie diplomatique.
Art. 2. Les crimes à raison desquels l’extradition devra être réciproquement accordée sont :
1° L’assassinat, l’empoisonnement, le parricide, l’infanticide, l’avortement, le meurtre, le viol, l’attentat à la pudeur consommé ou tenté avec violence, l’attentat à la pudeur consommé ou tenté sans violence, lorsqu’il l’aura été sur un enfant de l’un ou l’autre sexe âgé de moins de onze ans ;
2° L’incendie volontaire ;
3° La soustraction frauduleuse, si elle a été commise sur une voie publique ou de nuit et dans une maison habitée, ou si on a eu recours à la violence, à l’escalade, à l’effraction intérieure ou extérieure, ou, enfin, si celui à qui elle est imputée était un domestique ou un homme de service à gages ;
4° La fabrication, l’introduction et l’émission de fausses monnaies, la contrefaçon des poinçons servant à contrôler les matières d’or et d’argent, la contrefaçon du sceau de l’État et des timbre nationaux ;
5° Le faux en écriture publique ou privée et de commerce, la contrefaçon d’effets publics, de quelque nature qu’ils soient, et de billets de banque ; l’usage de ces pièces fausses ; mais sont toujours exceptés le faux commis sur les certificats, sur les passeports et autres faux qui ne sont point punis de peines afflictives ou infamantes ;
6° Le faux témoignage et la subornation de témoins ;
7° Les soustractions, par des dépositaires revêtus d’un caractère public, des valeurs qu’ils avaient entre leurs mains à raison de leurs fonctions, ainsi que les soustractions commises par des caissiers d’établissements publics ou de maisons de commerce, lorsqu’elles seront punies de peines afflictives ou infamantes ;
8° La banqueroute frauduleuse.
Art. 3. Les pièces qui devront être produites à l’appui des demandes d’extradition sont :
1° Le mandat d’arrêt décerné contre le prévenu, ou tout autre acte ayant au moins la même force que ce mandat, et indiquant également la nature et la gravité des faits poursuivis, ainsi que la disposition pénale applicable à ces faits ;
2° Le signalement du prévenu, afin d’en faciliter la recherche et l’arrestation.
Art. 4. Tous les effets saisis en la possession d’un prévenu lors de son arrestation seront livrés au moment où s’effectuera l’extradition, et cette remise ne se bornera pas seulement aux objets volés, mais comprendra tous ceux qui pourraient servir à la preuve du délit.
Art. 5. Si l’individu dont l’extradition est accordée était poursuivi par la justice du pays où il s’est réfugié, pour crimes ou délits qu’il y aurait commis, il ne pourra être livré qu’après avoir subi la condamnation prononcée contre lui à raison de ces faits.
Art. 6. Les crimes et délits politiques sont exceptés de la présente convention. L’individu dont l’extradition a été accordée ne pourra être, dans aucun cas, poursuivi ou puni pour aucun délit politique antérieur à l’extradition.
Art. 7. L’individu qui aura été livré en vertu de la présente convention ne pourra être jugé pour aucun délit autre que celui ayant motivé l’extradition, à moins que cet autre délit ne soit un de ceux compris dans ladite convention, et qu’on n’ait obtenu préalablement, dans la forme prescrite à cet effet par l’art. 3, l’assentiment du gouvernement qui aura accordé l’extradition.
Art. 8. L’extradition ne pourra avoir lieu, si la prescription de la peine ou de l’action criminelle est acquise d’après les lois du pays dans lequel le prévenu ou le condamné s’est réfugié.
Art. 9. Le gouvernement espagnol étant tenu de respecter le droit qu’acquièrent en Espagne certains coupables de se soustraire à la peine de mort en vertu de l’asile ecclésiastique, il est entendu que l’extradition qu’il accordera au gouvernement français des prévenus placés dans ce cas, aura lieu sous cette condition, que la peine de mort ne pourra leur être infligée, si cette peine qui, dans l’état actuel de la législation française, n’est applicable à aucun des prévenus admis en Espagne au bénéfice du droit d’asile, leur devenait plus tard applicable.
Une copie légalisée de la procédure qui aura été instruite à ce sujet devra être fournie, comme preuve à l’appui, au moment de la remise du prévenu.
Art. 10. Si un individu réclamé a contracté envers des particuliers des obligations que son extradition l’empêcherait de remplir, cette extradition n’en aura pas moins lieu, et il restera libre à la partie lésée de poursuivre ses droits par-devant l’autorité compétente.
Art. 11. Les frais occasionnés par l’arrestation, la détention, la garde, la nourriture et le transport à la frontière, des individus dont l’extradition aura été accordée, seront supportés par le gouvernement du pays où se trouvera réfugié le coupable.
Art. 12. La convention conclue le vingt-neuf septembre mil sept cent soixante-cinq sera considérée comme nulle et non avenue, et cessera d’être exécutoire un mois, jour pour jour, après l’échange des ratifications de la présente convention.
Art 13. La présente convention est conclue pour cinq ans, et continuera d’être en vigueur pendant cinq autres années, dans le cas où, six mois avant l’expiration du premier terme, aucun des deux gouvernements n’aurait déclaré y renoncer, et ainsi de suite, de cinq ans en cinq ans.
Elle sera ratifiée, et les ratifications en seront échangées dans l’espace de quatre mois, ou plus tôt s’il est possible.
En foi de quoi, les plénipotentiaires respectifs ont signé la présente convention en double expédition, et y ont apposé le sceau de leurs armes.
À Madrid, le vingt-six août mil huit cent cinquante.
Signé : (L. S.) P. de Bourgoing.
Signé : (L. S.) Pedro J. Pidal.
Pour copie conforme :
Le ministre des affaires étrangères,
Signé : Général de la Hitte.
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