À l’été 1847, l’agitation pour le libre-échange en France commençant à s’essouffler et les vieilles tensions ayant résulté en dissensions et en défections, Frédéric Bastiat sollicita Alphonse de Lamartine pour appuyer cette grande cause. (Voir sa lettre du 3 août 1847, absente de ses Œuvres complètes, et que nous avons publié ici.)
Malgré les critiques que l’auteur des Sophismes économiques avait porté à plusieurs occasions à l’endroit de ses idées, le poète accepta l’invitation et prononça à Marseille un discours mémorable (24 août 1847).
Le renfort de Lamartine à la cause du libre-échange fut vivement applaudi par le camp des libéraux, auquel elle offrait une nouvelle espérance. « Les partisans du système protecteur sont tous abasourdis des témoignages éclatants de sympathie que M. de Lamartine vient de donner à nos doctrines » clamait-on dans les colonnes du journal Le Libre-Échange (n° du 5 septembre 1847.)
Une nouvelle lettre découverte dans la correspondance du poète, et également absente des œuvres de Bastiat, fait état des sentiments de ce dernier à la suite de cette grande affiliation, qui devait toutefois rester sans lendemain.
L’éditeur de la nouvelle édition de la Correspondance d’Alphonse de Lamartine (1830-1867), publiée en huit volumes aux éditions Honoré Champion (2000-2008), donne de cette lettre un large extrait (vol. V, p. 163) :
LETTRE DE FRÉDÉRIC BASTIAT À LAMARTINE
8 septembre 1847.
[Bastiat remercie Lamartine de son] magnifique discours […] pour moi et pour notre cause, car j’ai bien compris que vous avez essayé de relever l’homme pour populariser l’idée. Il faut être grand et généreux comme vous l’êtes pour faire de ces libéralités. D’un mot vous pouvez créer une renommée, et ce mot vous le prodiguez à l’occasion. C’est d’une noble nature et je sens bien ce qu’il y a de grandeur d’âme dans ce patronage.
[Bastiat voudrait que Lamartine fît une campagne énergique, mais celui-ci a trois mois de travail à accomplir pour écrire l’histoire de l’Assemblée constituante.] La postérité y gagnera un beau livre. Croyez-vous que l’actualité n’y perdra pas quelque chose ? Je vous dis que, si vous étiez notre chef, nous déplacerions les partis, nous ferions la conquête du libre-échange, de la paix universelle, de l’association appliquée à la poursuite des réformes, et de toute l’immensité que ces trois choses renferment. Enfin, trois mois passent vite. Je les consacrerai volontiers à agrandir votre public. Malgré vos bonnes paroles, je ne me sens pas de force à être un premier, mais comme second, sous un chef tel que vous, je remplirais consciencieusement mon rôle […].
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